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Bordeaux: vin et passion

Messagepar Jean-Pierre NIEUDAN » Sam 1 Mai 2010 11:36

Je m'étais arrêtée à Bordeaux, il y a une quinzaine d'années, et même si j'avais pu apprécier la richesse historique de cette ville, j'en avais conservé un souvenir un peu triste, grave et austère, comme les romans de Mauriac. C'est donc avec ravissement que j'ai découvert une nouvelle cité, lumineuse, pimpante, moderne, où tout a été mis en oeuvre pour que les résidants comme les touristes puissent jouir du paysage mouvant de la Garonne entre une visite au Grand Théâtre, à la cathédrale Saint-André, à la Grosse Cloche ou à la basilique Saint-Seurin. En déambulant dans les rues étroites du quartier Saint-Michel ou des Chartrons (du nom des moines chartreux installés là au XIVe siècle), l'étranger mesure à quel point Bordeaux méritait d'être classée au patrimoine mondial de l'UNESCO. Et à quel point elle en est fière; les façades ont été magnifiquement restaurées, les quais, aménagés, et on a mis en service un tramway qui permet aux visiteurs de passer des Quinconces à la place Gambetta en quelques minutes.

Paris est une des destinations favorites des Québécois; Bordeaux n'étant qu'à trois heures et demie, en TGV de la Ville lumière (25 allers-retours quotidiens), il serait dommage de se priver d'un séjour dans la capitale girondine, où on célèbre tout au long de l'année les trésors de la vigne. Sauvignon, sémillon, merlot, cabernet franc, cabernet sauvignon, petit verdot, muscadelle poussent dans le vignoble bordelais, le plus vaste au monde : 115 000 hectares, 60 appellations, 750 millions de bouteilles par an, dont 35 % sont destinées à l'exportation.

On vit depuis des centaines d'années au rythme du vin à Bordeaux, on parle ainsi «d'aristocratie du bouchon» à propos des grandes familles négociantes bordelaises et il faut impérativement visiter le Musée du vin aménagé dans les caves voûtées où des maquettes, des documents et une animation en 2D facilitent la compréhension de ce commerce particulier.

C'est l'occasion ou jamais cette année de plonger dans l'univers bordelais : du 24 au 27 juin, les crus du Médoc, de l'Entre-deux-mers, des côtes de Bourg et de Blaye, de Pomerol, des Graves et de Saint-Émilion seront au coeur d'une grande manifestation et la ville de Québec, jumelée à Bordeaux, en sera l'invitée d'honneur.


L'Office du tourisme propose aux visiteurs un forfait allé­chant : deux nuits à l'hôtel (deux, trois, ou quatre étoiles), une visite guidée de la ville et le fameux Pass Dégustations : on vous remet un verre et un carnet de 12 dégustations dans les pavillons qui pousseront sur deux kilomètres le long de la Garonne. Lors de l'événement, des cours accélérés (20 minutes) d'initiation ou de mixologie (cocktails) sont offerts quotidiennement et chaque soir, entre 18h et 20h, un chef différent vous propose des accords mets-vin. François Blais du réputé restaurant Le Panache, à Québec, créera une de ces séries d'harmonies.

Et quand tombe la nuit sur le port, la magie d'un spectacle son et lumière sur les façades des monuments clôt ces journées inoubliables.

Pour ceux qui ne pourraient se libérer en juin, un forfait Bordeaux découverte est proposé tout au long de l'année : visite dans un vignoble, carte d'accès gratuit aux principaux monuments et musées, bouteille de vin, carte de transport urbain, visite guidée de la ville et coupe de champagne au Casino Théâtre (http://www.bordeaux-tourisme.com).

Si ces deux formules sont séduisantes, je suggérerais cependant aux vrais amateurs d'arriver une journée plus tôt et de s'inscrire aux formidables cours offerts par l'École du vin. En deux heures, j'y ai appris une foule de détails passionnants sur les arômes, les régions, les cépages, la réglementation, la dégustation, les marchés, les harmonies, les règles de conservation.

Le formidable enthousiasme de Bénédicte Trocard à partager sa passion (elle est non seulement une pédagogue accomplie, mais aussi une productrice) m'a permis d'approfondir des connaissances trop vagues, d'assimiler le vocabulaire du vin et de rectifier des idées reçues.

Ainsi, pour qui a voyagé en Champagne ou en Bourgogne, visiter les châteaux bordelais peut déstabiliser, car la vente aux particuliers n'est pas monnaie courante. Manque d'intérêt pour le touriste? Surtout pas, mais la taille du territoire se traduit par un certain éloignement entre chaque château et tous les vignerons ne peuvent avoir un service d'accueil et de dégustation au cas où quelques visiteurs se présenteraient à la porte.

Pour commercialiser leurs vins, les viticulteurs s'en remettent donc à des courtiers. Ceux-ci rencontrent les négociants, qui s'occupent des exportateurs et des distributeurs qui placeront les vins chez les commerçants. Ce sont ces derniers qui vanteront les tannins souples, le corps, la vivacité, l'élégance et la charpente d'un vin aux consommateurs.

Et qui pourront peut-être clarifier pour vous la complexité des crus classés, un vrai casse-tête qui provoque des commentaires depuis 1855! Sous la salle de cours de l'École du vin se trouve un bar, clair, contemporain, cosy pour parfaire notre initiation. Les vins (une trentaine) sont servis au verre et accompagnés d'une fiche de présentation.

Dans le même esprit, une visite charmante à la fromagerie Baud et Millet s'impose; si certains auront le temps de s'attabler pour dîner, d'autres préféreront la formule ludique où on choisit soi-même à la cave les fromages parmi plus d'une centaine avant de les déguster avec le vin qui leur convient. Tous plus savoureux les uns que les autres, il est difficile de se décider entre un Puligny St-Pierre, un Langres, un Maroilles, une fourme du Limousin, une pâte ferme ou un brebis... Un peu de chaque, peut-être?

Bien manger

Les gros appétits se réjouiront, après avoir arpenté le Jardin public ou grimpé au haut de la tour Pey-Belland, de se sustenter à la Brasserie bordelaise, tout près de la place du Parlement, où la viande est reine. Végétariens s'abstenir; dans ce resto aux murs de pierre, aux tables en bois, des assiettes qui raviraient Gargantua nous mettent en appétit dès qu'on pousse la porte : on dévore entrecôte, le jambon cru, la bavette (22$) et le boeuf bourguignon (24$) dans un joyeux tintamarre. La formule à 24 ? (environ 32 $), boudin noir-poulet fermier (énorme!) et moelleux au chocolat, est très honnête et permet de reprendre la route pour un bon moment!

Pourquoi ne pas musarder vers les allées de Tourny, à la place des Grands Hommes, où se succèdent de fort belles boutiques de luxe? Ou se promener le long de l'esplanade des Quinconces, admirer les colonnes rostrales que domine la statue de la Liberté brisant ses chaînes?

À quelques mètres de cette esplanade où se dressent parfois des manèges, les tentes d'un cirque, des étals de foire à la brocante ou aux vins (évidemment!), les quais superbes et un des plus intéressants restaurants de la ville : Le Gabriel. À l'étage, il fait bistro mais au second, dans un écrin immaculé, les grandes nappes blanches, l'argenterie, un éclairage flatteur et une vue imprenable sur la place de la Bourse et la Garonne annoncent les plaisirs d'une très grande table.

Dès la mise en bouche, le talent de François Adamski se manifeste; la délicatesse de la pomme purée sur feuilleté ravit le gourmand qui se délecte ensuite avec bonheur d'un tartare de homard tout en finesse. Des noix de Saint-Jacques marinées au fruit de la passion, servies sur un émincé de potiron et de wakamé, séduisent par leur originalité et leur fraîcheur et le bar rôti en croûte d'anis, sa polenta au fenouil et aux coquillages, charme les papilles tout comme le sublime Château Bonnet 2008 aux arômes d'agrumes, de fruits exotiques.

Les nostalgiques opteront pour le Belle-Époque, un restaurant fondé en 1865 qui fait face au quai de la Lune. Son étonnant décor de faïence aux teintes turquoise, son plafond à caissons, les miroirs anciens rappellent les affiches de Mucha, mais la cuisine, malgré son classicisme, a des fantaisies contemporaines tels ces divins pétoncles au caramel salé, sa tarte fin de palombe au chou et cassis ou la crème brûlée au café et au whisky. Pour les amateurs de ce liquide ambré, le Belle-Époque en propose une vingtaine. Avec le sourire : le service vraiment chaleureux nous donne l'impression d'être de ces habitués qui viennent régulièrement se délecter de ris de veau aux morilles.

Un dernier verre? On se plaît à L'Utopia, une ancienne église transformée en cinéma qui jouit d'une terrasse très bien exposée place Camille-Julllian et à La Robe (3, quai Louis XVIII, http://www.la-robe.fr) où on sert exclusivement des vins de viticultrices. Les femmes sont de plus en plus nombreuses dans le monde du vin et il faut souligner le travail des Médocaines, quatre propriétaires qui se sont unies pour mieux faire connaître leur métier et les merveilles de la vigne. Tout au long de l'année, des ateliers sur mesure sont proposés pour démystifier les vendanges, l'assemblage, les accords mets-vin. Durant l'été, les propriétés sont ouvertes aux visiteurs, Château Loudenne dans le Haut-Médoc, Château La Tour de Bessan, près de Margaux, Château Paloumey et, tout près de Bordeaux, le Château de Taillan, le fief d'Armelle Falcy-Cruse, qui a succédé à son père à la tête du vignoble et qui propose des dîners aux chandelles dans le cadre ensorceleur des vieux chais.

Pour les becs sucrés

Les becs sucrés ne sauraient quitter la région sans s'arrêter dans une des boutiques de l'incontournable Baillardran, où on fond de bonheur en humant les parfums caramélisés de l'emblème gourmand de la région : le fameux cannelé, un petit gâteau à la fois moelleux et croquant. On fera aussi une halte pour acheter les chocolats de Cadiot-Badie, rue de Tourny, dont le magasin est réputé depuis 1826!

Deux conseils avant votre départ : si vous choisissez de voyager en été, n'oubliez pas d'apporter un vêtement chaud pour la visite des caves et des châteaux, car il y fait en moyenne - 13 degrés.

Et à votre arrivée à Bordeaux, faites un saut à l'Office du tourisme; l'ambiance sympa, le dynamisme joyeux des employés, les nombreuses suggestions d'itinéraires, de visites guidées (dont les Médocaines) faciliteront votre séjour dans une des plus belles villes de France. Le miroir d'eau sur les quais et le square au mur végétal de Patrick Blanc valent à eux seuls le déplacement. Bordeaux la nouvelle vous attend!


Chrystine Brouillet, collaboration spéciale
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