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« Jamais le vin de Bordeaux n'a été aussi bon »

Messagepar Jean-Pierre NIEUDAN » Dim 21 Juin 2009 15:37

Evolution des goûts, intérêt du vieillissement, millésimes... Jean-Marc Quarin, critique bordelais, veut remettre la dégustation au centre du jeu .

Depuis seize ans, Jean-Marc Quarin déguste et note des vins. Spécialiste du Bordelais, il publie des carnets qui fourmillent d'informations . Dispensant aussi de nombreuses formations, ce « coach du palais » prêche pour une éducation au goût et au savoir boire juste. À l'occasion de l'ouverture du salon Vinexpo, il nous reçoit chez lui, près de Bordeaux.

« Sud Ouest Dimanche ». Y a-t-il à Bordeaux une filiation entre les vins produits il y a trente ans et ceux d'aujourd'hui ?

Jean-Marc Quarin. Oui, elle s'incarne dans la notion d'équilibre au sein du triptyque acidité, tannins et alcool. Bordeaux est ce vin policé en bouche qui glisse sans accrocher. Ni surdimensionné, ni sous-dimensionné. Ce raffinement et ce toucher sont dans l'ADN du vignoble, un des premiers à les avoir maîtrisés. D'autres y arrivent aussi. En Gironde, l'élevage sous bois sert également à patiner la structure du vin, comme un meuble.

Il faut donc attendre pour boire un bon bordeaux ?

Il faut distinguer les vins courants, qui peuvent parfois procurer un certain plaisir immédiat, des grandes étiquettes. Pour ces dernières - 500 crus en Bordelais -, c'est d'ailleurs toute la difficulté des dégustations en primeur. Ces dégustations sont réalisées quelques mois après la vendange, sur un vin encore en cours d'élevage et qui ne sera disponible que près de deux ans après la récolte. Un néophyte pourra préférer un bon vin jeune à un grand vin jeune. Car ce dernier est plus fortement constitué et donc moins accessible dans l'immédiat. Alors que le bon vin jeune est moins concentré. C'est ainsi qu'en dégustation à l'aveugle, quelqu'un de peu expérimenté pourra préférer le second vin d'un château à son premier vin ! Car il est moins densément constitué. C'est l'éducation au goût qui pourra faire la différence. D'où l'intérêt aussi d'un oenotourisme bien fait et formateur pour les visiteurs.

On en serait donc aux balbutiements pour l'éducation au goût ?

Tout à fait ! Il faut se rappeler que la dégustation n'était même pas au programme au début du diplôme d'oenologue. Avant les années 1980, le goût du vin n'était même pas une question... Il était absent du jeu. Le producteur devait tous les ans sauver son raisin des intempéries et faire du vin, c'est tout. C'est à partir du bon millésime 1982 que les questions de goût sont intégrées. C'est d'ailleurs les débuts du métier tout neuf que nous sommes quelques-uns à exercer, celui de critique de vin. 25 ans après, les choses sont plus mûres et je pense que tout consommateur doit avoir davantage confiance dans son propre goût et être moins tributaire de ceux qui dictent la loi. Il gagnera en liberté.

Est-ce à dire qu'il ne faut pas par exemple trop s'attacher dans son choix aux AOC ou aux millésimes ?

Les goûts vont plus vite que les codes. Ces données sont des informations mais j'encourage les amateurs à aller plus loin. À prendre confiance et à mettre leurs goûts au centre de leurs choix. Nous savons par exemple qu'il y a parfois de meilleures bouteilles en AOC Castillon (et moins chères !) que chez leur plus prestigieux voisin de Saint-Émilion... Concernant les millésimes, beaucoup reste à faire aussi. Bordeaux réalise deux ou trois grandes années par décennie mais ne sait pas communiquer sur les autres. Pourtant, elles peuvent aussi apporter du plaisir à d'autres niveaux. On en revient là à notre problématique des vins à apprécier plus jeunes.

Comment conseillez-vous de consommer les grands vins ? Avec quelle gestion du vieillissement ?

Depuis 1982, nous avons bien sûr eu de grandes années à Bordeaux : 1985, 1986, 1989, 1990, 1996 (en Médoc), 1998 (sur la rive droite), 2000, 2001 (rive droite), 2003 (en Médoc) ou 2005. Par expérience, je conseille de goûter une bouteille à la livraison chez soi (pour les grands vins, c'est deux ans après la récolte) et d'attendre encore cinq ans. Ce qui nous amène sept ans après la vendange, et ce afin de constater les évolutions. Le vin s'ouvre ou se ferme, amène d'autres arômes... Voilà comment, aujourd'hui, en 2009, on redécouvre un millésime comme 2002. Malheureusement, il n'y a pas de prévisionnel mathématique. Il faut ouvrir, jauger... Je pense cependant qu'une grande année au départ (comme 2005) devient toujours encore meilleure plus tard, avec des sensations aromatiques plus complexes et sophistiquées, tant au niveau de la structure que des arômes.

Il y a donc des pièges à éviter ?

Deux principaux. On boit souvent les grandes années trop tôt. Parce que c'est bon, que l'on veut épater des amis... Mais on perd du bonheur dans dix ou vingt ans, c'est un choix. Cela arrive cependant davantage à l'étranger qu'en France, où attendre est encore une culture. Deuxième erreur : on boit souvent les petites années... trop tard. Ce n'est pas parce qu'un grand nom est sur l'étiquette que le temps bonifiera le contenu. Encore une fois, c'est un équilibre difficile à trouver.

Pensez-vous qu'il y a une standardisation des goûts des vins ?

Il y avait autrefois davantage de différences car les vins mauvais ou médiocres étaient plus nombreux ! Le niveau général, à Bordeaux comme ailleurs, s'est beaucoup amélioré. Jamais les vins n'ont été globalement si bons, d'où une garantie de plaisir. C'est le fruit d'un gros travail dans les propriétés, mais aussi de l'exigence des clients.

Cette « standardisation » de la bonne qualité ne me gêne pas du tout ! Il faut maintenant passer des bons vins aux grands vins, en travaillant sur les styles. Et, encore une fois, le consommateur doit s'exprimer pour faire avancer les choses. Heureusement, le vin est un médiateur, un des rares moyens autorisés pour parler en société de ses émotions.



Pendant Vinexpo, les belles robes sont de sortie. Hier, rendez-vous était donné à La Mission Haut-Brion. Ce soir, direction Lafite-Rothschild. Et demain, André Lurton reçoit à La Louvière.

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Le Français boit moins mais mieux

La France dans le monde

La France est le premier pays producteur, consommateur et exportateur (avec l'Italie) de vin au monde. Plus de 60 pays produisent du vin. De très loin, le trio France-Italie-Espagne arrive en tête.

Une tendance lourde se dessine partout depuis des années : la consommation baisse dans les pays historiquement producteurs (le trio cité mais aussi le Portugal et l'Argentine) alors qu'elle se développe dans le monde anglo-saxon, en Europe du Nord, en Asie... La consommation mondiale est en légère hausse et les prévisions sont optimistes. États-Unis, Grande-Bretagne et Allemagne sont les principaux pays importateurs.

L'important marché national

Il se boit en France près de 31 millions d'hectolitres de vin par an (un total en baisse), soit deux fois le volume de bière consommé. En volume, les 2/3 de la production nationale sont bus sur place (1/3 exporté). L'Hexagone produit tous les types de vin mais aussi des eaux-de-vie issues de raisin (cognac, armagnac, brandy...). Aucun pays ne produit autant de grands vins, en gros volumes (grands bordeaux, bourgognes, côtes-du-rhône, champagnes...).

Consommation de week-end

De moins en moins de Français boivent du vin tous les jours. Avec aujourd'hui moins de 60 litres par an et par habitant (c'était 160 litres en 1965), on boit moins mais des bouteilles de meilleure qualité. La consommation s'oriente vers le week-end et les jours festifs. Il n'y a pratiquement plus de buveurs au quotidien ayant moins de 35 ans. Bien que l'Hexagone soit « le » pays du vin, plus d'un Français sur deux n'en boit jamais. Le prix moyen d'une bouteille ouverte à domicile par un Français est inférieur à 3 euros. L'idée commune que le vin est un produit cher est complètement contredite par les faits.

Le rosé et les bulles

Le vin rouge est de loin le préféré des Français. Mais deux marchés sont en essor : effervescents et rosés. Même si le repas reste le moment privilégié, on déguste le vin de plus en plus à l'apéritif et hors repas, comme les Anglo-Saxons. Cela explique le succès du bag-in-box (BIB), qui permet de se faire plaisir sans avoir à entamer une bouteille.

Grande distribution en tête

Les Français achètent surtout leurs vins dans les super et hypermarchés. Les foires d'automne étant le moment privilégié pour constituer des réserves. Par contre, dans les restaurants, les ventes seraient en chute libre. Mais il n'existe pas de statistiques sur ce créneau, tout comme sur celui des cavistes ou de la vente directe à la propriété. Avec l'essor de l'oenotourisme, cette dernière serait en croissance.

César Compadre
http://www.sudouest.com/accueil/actuali ... 79541.html
La vérité est dans la bouteille ..( Lao Tseu )
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Jean-Pierre NIEUDAN
 
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