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"Le vin a une image exceptionnelle en Belgique"

Messagepar Jean-Pierre NIEUDAN » Jeu 19 FĂ©v 2009 12:51

Deuxième marché d'exportation pour les vins français en volume en 2008 et numéro 3 en valeur, la Belgique ne fait pas l'objet de la même attention que ses voisins de podium. Pourtant, quand les marchés britannique et américain piquent du nez, la Belgique se révèle plus solide. On sait la Belgique partagée entre deux langues et deux cultures mais il faut aller plus loin pour cerner sa double consommation de vin : Damien de Konninck (Sopexa Belgique) fait le point sur le marché belge et ses composantes.

Comment caractériseriez-vous la consommation de vin en Belgique ?

La consommation belge de vin est très stable depuis quelques années, établie entre 170 et 175 millions d'hectolitres. Cette stabilité cache des disparités entre l'évolution de la consommation de vin en Flandres et en Wallonie dont je reparlerais.

Car, qu'il soit wallon ou flamand, le consommateur belge est très instruit et exigeant : il connaît mieux les appellations et les grands crus que beaucoup de Français ; il dispose d'une ouverture sur le monde qu'il utilise complètement en Flandres et aussi, dans une moindre mesure en Wallonie, où la France reste la référence. Le consommateur belge lit beaucoup la presse, pour qui l'art de vivre, la gastronomie, et en particulier le vin, est un sujet très présent : pas un magazine, pas un quotidien qui n'ait régulièrement un article, voire une rubrique dédiée au vin et au plaisir de déguster. Le vin a une image exceptionnelle en Belgique : notre presse profite pleinement de ne pas être soumise à la loi Evin ! Par ailleurs, les cours de dégustation se multiplient, les importateurs font des journées portes ouvertes fréquemment, la vente directe s'appuie sur ces relais très décentralisés... Pour nous, organisme de promotion, fédérer ces initiatives est un vrai challenge. Pour le consommateur, les producteurs et les opérateurs, c'est le signe d'un marché vivant, ouvert, averti et très actif.

Il faut ensuite différencier la consommation de vin en Flandres de celle en Wallonie. Si la consommation globale reste stable, cette stabilité cache une inversion de tendance, avec un marché flamand en hausse au détriment de la bière. Durant les 20 dernières années, la consommation est restée constante dans le sud (en Wallonie, 35 % de la population belge) mais a doublé dans le nord du pays (en Flandres, 55 % de la population belge*).

Le consommateur flamand est très différent du consommateur wallon. Les différences touchent la couleur, la place des concurrents de la France et les modes de consommation. Sur le mode germanique ou anglais, selon les cas, le Flamand consomme davantage de vin blanc que le Wallon (37 % contre 21 %), davantage de vins du monde, davantage hors des repas que le consommateur wallon. Ce dernier est culturellement plus proche de la France avec une consommation à table, une préférence aux rosés quand on ne boit pas de rouge (21 % de la consommation contre 6% en Flandres ; le Sud représente 71 % du rosé consommé en Belgique) et les vins français comme référence… Typiquement, en 2008, le marché flamand a absorbé 70 % du vin du Nouveau Monde acheté en Belgique, tandis que la Wallonie et Bruxelles ont absorbé 60 % du vin français.
Il convient de noter cependant que le vin est la boisson préférée de 47 % des Flamands ( et de 50 % des Wallons et jusqu’à 69 % des Bruxellois), ce qui est aujourd’hui plus proche du chiffre français (50 %) que des référents britannique ou allemand (38 et 39 %), voire néerlandais (44 %).

*Le solde (10 %) correspond à l’agglomération de Bruxelles

Quelle sont les perspectives d'évolution de la consommation belge et comment la France peut-elle tirer son épingle du jeu ?

En cinq ans, la France a perdu 16 points de parts de marché au bénéfice du Nouveau Monde d’un côté et de la concurrence européenne de l’autre. Avec une consommation ultra internationale, la Flandres a été et est très réceptive aux vins du Nouveau Monde ; la Wallonie aussi, mais dans une moindre mesure.

La progression des ventes des vins du Nouveau Monde tend cependant à se stabiliser, car la consommation flamande connaît aujourd’hui une montée en gamme ou du moins une recherche de l’authenticité qui passe par un retour vers l’Europe. Elle se traduit par une hausse du prix moyen consacré à une bouteille de vin par le consommateur flamand (3,3 €), aujourd'hui supérieur à celui du consommateur wallon (2,8 € mais 3,4€ à Bruxelles). Ce retour vers l'Europe a jusqu'ici joué en faveur de l'Italie et surtout de l'Espagne, bien plus qu'en faveur de la France.

Comme peut l’être un Allemand ou un Anglais, le Flamand est très sensible aux arguments latins en ce qui concerne l’art de vivre en général, la gastronomie et le vin en particulier. Ils sont ouverts à cette séduction et les Espagnols ont su jusqu’ici en tirer un meilleur parti que les Français qui n’ont pas joué cette carte. Aujourd’hui, l’Espagne est le pays à la mode en Belgique, en particulier en Flandres, qu’il s’agisse de gastronomie ou d’architecture, façon bodega, de musique ou du phénomène Cava, la concurrence espagnole est partout.

C’est un créneau sur lequel les Français doivent se positionner.

Quelles sont les spécificités du marché belge auxquelles vous recommanderiez aux Français de prêter la plus grande attention ?

Il y a la double culture flamande/wallone, dont nous avons déjà parlé. Il y a quelques années, j’aurais évoqué la nécessité de moderniser les packagings, en particulier pour le marché flamand, sensible aux design innovants et ouverts que lui ont proposé le Nouveau Monde, alors que le marché wallon laisse encore de la place à des étiquettes traditionnelles. A l’heure actuelle, entre les vins de cépage et des étiquettes épurées, la France a fait des efforts considérables et ils sont reconnus. A poursuivre, donc.

Je recommenderais aux producteurs d’être dans les salons et dans la presse. Les Belges vont dans les salons internationaux : le Salon des Vins de Loire, Vinisud, Vinexpo, ainsi que la London Wine Fair et Prowein. Ces salons restent un endroit incontournable pour rencontrer les professionnels belges du vin, notamment ceux de l’hôtellerie, de la restauration et les cavistes (horeca) qui assurent 25 % de la distribution de vin en Belgique ! Ce relai est incontournable, cette proportion rapproche le marché belge du modèle français, avec une belle place au conseil et aux vins à forte valeur ajoutée.

Le besoin de conseil se lit aussi dans l’importance que les Belges accordent aux conseils délivrés par la presse. Les Français doivent savoir que la presse belge accorde une place considérable au vin et à la gastronomie. Nous n’avons pas de loi Evin et nous nous en donnons à cœur joie pour parler de vin et de plaisir de déguster. Il faut donc être là où se fait la tendance, c’est à dire dans la presse. Les opérateurs du monde du vin en sont de plus en plus conscients, on le lit dans leurs objectifs lorsqu’ils viennent nous voir pour concevoir des opérations de promotion : la stratégie de relations presse est indissociable de la stratégie d’image et de promotion de la marque.

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