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[Jean-Pierre NIEUDAN]

Ils manifestent leur incompréhension face à la décision de Bruxelles

L'Union européenne a levé récemment l'interdiction d'utiliser le coupage pour le vin de table rosé. Ce dernier pourra désormais être fabriqué grâce à un mélange de vin blanc et de vin rouge. Une décision contestée en bloc par les vignerons français. Notamment par les viticulteurs provençaux qui sont devenus les plus gros producteurs de vins rosés du pays.

La pratique du "coupage" était jusqu'à présent interdite en Europe pour l'ensemble des vins de table. En France, seuls les champagnes rosés sont fabriqués suivant ce procédé. Jean-André Charial, le président des Vignerons des Baux, s'insurge contre cette directive.

"Si une telle loi passe, c'est à ne plus rien y comprendre, lance-t-il.C'est un véritable scandale: il s'agit de la négation du savoir-faire des vignerons qui a été obtenu grâce à des décennies de travail. Il me paraît grave et inadmissible que des fonctionnaires décident aujourd'hui de traiter le vin comme un produit industriel. Nous sommes en présence d'un produit noble qui s'inscrit dans le patrimoine culturel d'un pays. Cette mesure est impensable pour des gens qui travaillent leurs vignes avec passion."

Une surproduction de vins blancs en Europe
Caroline Missoffe, la propriétaire du mas de la Dame, avec sa soeur Anne Poniatowski, manifeste sa totale incompréhension face à une telle mesure. "Nous n'arrivons pas à en comprendre l'utilité. Certains pays européens ont actuellement des problèmes de surproduction de vins blancs: le mélange blanc/rouge devrait leur permettre d'écouler leurs stocks. Cette raison est peut-être valable au niveau européen, mais elle scandalise les vignerons français."

Et de rajouter, au sujet de la production des vins rosés AOC des Baux-de-Provence : "Nous nous sommes battus pendant des années pour améliorer nos techniques de vinification et pour créer un vin rosé de grande qualité, aux saveurs uniques et aux arômes délicats: fleurs blanches, fruits rouges, agrumes… Nous sommes d'ailleurs soumis à des normes draconiennes. Et si l'on parle maintenant d'un rosé de gastronomie.

"C'est bien la preuve que notre travail et nos recherches n'ont pas été vains ! Nous sommes arrivés à anoblir un vin qui a été décrié pendant des années. Les consommateurs français et étrangers ne s'y trompent pas. La demande augmente chaque année et les Américains, qui n'achetaient pas de vins rosés dans le passé, s'y intéressent chaque année un peu plus."

Une différenciation indispensable
Face à cette polémique, la commission européenne a réagi cette semaine : un système d'étiquetage sera mis en place pour informer les consommateurs. Deux mentions devront figurer sur les étiquettes des vins rosés produits en Europe : "rosé traditionnel" pour les vins obtenus par les méthodes de vinifications traditionnelles et "rosé par coupage" pour ceux obtenus par le simple mélange entre vin blanc et vin rouge.

Mais l'enjeu principal de cette levée d'interdiction, ne serait-il pas de "doper" la compétitivité et de permettre à certains états européens de conquérir de nouveaux marchés en émergence ?

Le salon des vignerons
Le salon qui réunit chaque année les producteurs qui bénéficient de l'AOC Vin des Baux se déroulera le week-end des 16 et 17 mai à la salle Agora, à Maussane. Entrée gratuite.

Bernadette Quilici
http://www.laprovence.com