Née dans une parcelle du département dénuée de vignes, à Prévinquières, près de Compolibat, on n'ira pas dire que Karine Scudier est tombée dedans quand elle était petite. Quoique. « Dans ma famille, on était des habitués des grandes tablées, des grands repas, avec toujours du vin. Et très vite, j'ai eu envie de savoir ce qu'il y avait derrière la bouteille. » Aujourd'hui, elle est de celles qui connaîssent sans doute le mieux l'Aveyron viticole. A la fois conseillère viticole à la Chambre d'agriculture et oeuvrant à la Maison de la vigne d'Estaing, elle ne se lasse pas de parler de ces vins aveyronnais pour lesquels se récoltent ces jours-ci les fruits de la cuvée 2009.
Un premier stage chez Matha, dans le Vallon, la bonne école, Puis un passage à Millau, une région trop peu connue pour son vin, et aujourd'hui, donc, elle veille sur le vin d'Estaing et d'Entraygues. Les quatre terroirs viticoles du département, sur lesquels poussent environ 300 hectares de vignes - 197 pour le Marcillac, une vingtaine pour Estaing, idem à Entraygues, et environ 60 à Millau – n'ont plus de secrets pour elle.
En Aveyron, cent onze vignerons vivent de leur production ; « puis il y en a beaucoup qui possèdent des vignes pour compléter les revenus de l'exploitation. » Avec ce constat récurrent, tous en prennent soin. « J'ai été vraiment bluffée par la qualité des vins de pays. De petits producteurs font des vins très étonnants. Et ils sont nombreux. Pensez, soixante-dix-huit communes de l'ouest du département, dans un arc-de-cercle reliant Villefranche-de-Rouergue à Entraygues, hébergent des vignes. » Avec une locomotive : Marcillac, qui s'apprête à fêter les 20 ans de son appellation d'origine. « En vingt ans, ce vin a fait des progrès fulgurants. Chacun a su apporter sa pierre à l'édifice. S'il y a vingt ans, un seul vigneron était formé à cela, aujourd'hui cela change. Des gens sont devenus des viticulteurs à part entière. » Et de conclure : « A mon avis, il ne faut plus grand-chose pour le hisser à un haut niveau. » Les prochaines dispositions européennes devraient également tirer la production vers le haut. En effet, les VDQS (Vins de Qualité Supérieure) vont disparaître. La plus grande partie sera classée en AOP, le reste en IGP et cela concerne Estaing, Millau et Entraygues-Le Fel ; les AOC (Appellation d'Origine Contrôlée) deviendront AOP (Appellation d'origine protégée). « Les cahiers des charges sont plus étoffés, cela fera progresser la production », fait remarquer Karine. Une bonne nouvelle finalement à l'heure où les vins aveyronnais semblent plus séduisants. « Sur Paris, ils sont très appréciés. Les gens connaissent le terroir viticole aveyronnais, ce qui n'est pas forcément le cas d'habitants du centre de la France. » A l'étranger aussi, une image commence à se dégager. « On travaille notamment l'exportation vers la Chine. » La cuvée 2009 qui s'annonce ne devrait pas nuire à la promotion, tant les vendanges s'annoncent prometteuses. « Cette année, c'est superbe. Bon, il aurait fallu un petit orage autour du 15 août, cela aurait été le petit plus. Et dans le sud du département, il y a une belle maturité et un état sanitaire superbe. » Et à Prévinquières, chez ses parents, serions-nous tentés de lui demander.
Car Karine Scudier n'a pas résisté à planter 250 pieds de vigne sur l'exploitation de ses parents.
Philippe Routhe
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