par Frédéric B. » Mer 1 Juil 2009 18:03
Stéphane,
J'avais aussi été très troublé par la contre-performance de Montrose 2003 dans notre dégustation... Placé en première partie, un peu "anonyme" parmi les quelques vins lançant la dégustation...
Résultat, beaucoup l'avaient très mal goûté, et même les plus généreux soulignaient qu'il n'était, à cet instant t, pas à la hauteur de sa réputation. Me souvenant de l'immense barouf qui avait été fait au moment des primeurs (le "rapport qualité/prix du siècle"), j'avais été interloqué. Je l'avais très mal goûté, mais je me considère incapable de juger du potentiel futur de vin, ce que des dégustateurs chevronnés peuvent déceler beaucoup mieux. Mais tout de même...
Bien sûr, un autre biais est possible: avions-nous inconsciemment considéré que tous les vins de la première série ne pouvaient être que des seconds couteaux, et sous-noté même ceux qui avaient du potentiel?
Difficile à dire, encore plus quand on songe que deux bouteilles d'un même vin, sur le même millésime et provenant de la même caisse, goûtés à 24h de distance peuvent se révéler complètement différents.
Mes dégustations à l'aveugle de grands vins, principalement à Bordeaux, se sont pour le moment toutes révélées décevantes (Haut-Brion 1995, Las Cases 2001 à deux reprises, Montrose 2003, Poyferré 2003, Gruaud-Larose 2000, Pichon Comtesse 2004, et même Clos de Tart 2001, très bon mais dont j'aurais attendu des merveilles), à l'exception de Rayas 2000, Château d'Ampuis 1999, Latour 1970 et Cristal 1976. Et comme un fait exprès, de "grands" vins étrangers se sont eux révélés de pures merveilles: je pense au Shirvington Shiraz 2003 dégusté chez les Vinosophes, et à un Sine Qua Non Midnight Oil 2001 phénoménal. Lorsque j'ai moi-même fait goûter des "grands" ou plutôt grands à l'aveugle à des amis dégustateurs, les Bordeaux n'ont pas été à la fête non plus: les convives se sont notamment régalés avec une Marie Beurrier 1999 et une Janasse VV 2001. Les Bordeaux qui les ont accompagnés, toujours à l'aveugle, n'ont pas déplacé les foules (notamment Barton 2001 et Pape-Clément 1998).
Tout cela fait se poser des questions, et j'ai bien envie d'ouvrir quelquefois de très grands Bordeaux à l'aveugle, sans mettre la puce à l'oreille des dégustateurs ("attention, si vous discutez, vous allez manquer quelque chose!!")...
L'idée, évidemment, n'est pas de bâtir un système idéologique dans lequel on casserait du 1er GCC (c'est trop cher, ça vaut pas le prix, c'est indigne de son rang, etc.), mais de se dire que si à l'aveugle on ressent dix fois plus de plaisir avec une Janasse Vieilles Vignes, un Rayas ou un Domaine de l'A, qu'avec un Montrose, un Barton ou même un Château Margaux, ce serait bête de continuer à acheter les seconds...
Pour revenir à Reignac et Pétrus, j'adorerais les goûter un jour, tous les deux, perdus dans une dégustation de 15 vins, sans savoir qu'ils sont servis, pour connaître mon goût personnel, à cet instant-là , et sur ces bouteilles-là ...
Mais il y a encore tellement de biais humains qui interfèrent sur les sentiments de dégustation (humeur, concentration, état physique, ambiance, etc.) qu'il serait tout à fait vain de tirer des conclusions sur les résultats de telle ou telle dégustation.
Barème de notation: 19+ à 20 = Vin mythique / 18+ à 19 = Vin exceptionnel / 17+ à 18 = Grand vin / 16+ à 17 = Excellent vin / 15+ à 16 = Très bon vin / 14+ à 15 = Bon vin / 13+ à 14 = Vin moyen / 11+ à 13 = Vin médiocre / 10 à 11 = Vin très faible