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[Jean-Pierre NIEUDAN]

La nouvelle appellation Côtes de Bordeaux part à la conquête du monde avec le chef bordelais Jean-Pierre Xiradakis en figure de proue

C'est le rude combat de la notoriété, indissociable du destin vineux. Vous pensez être connu à Honolulu et vous n'êtes clairement identifié qu'à Landiras. Les Côtes de Bordeaux - Blaye, Francs, Premières Côtes (Cadillac) et Castillon, sans Bourg donc - ont tiré les conclusions qui s'imposaient.

Elles sont officiellement mariées depuis le 5 mars . Elles feront désormais cause commune à partir du millésime 2008, l'étiquette portant chaque mention communale sous le titre générique « Côtes de Bordeaux ». Hors du mot magique Bordeaux, et à un degré nettement moindre, des sons Saint-Émilion et Margaux, la planète humaine ne retient rien de l'identité propre des vins de Gironde.

Posséder un nom de famille où figure Bordeaux rapproche d'une possible clientèle. La crise actuelle a surligné cette évidence. Deuxième constat : la consommation du vin promise à la baisse sur le vieux continent européen trouvera son salut à l'export, plus exactement vers l'Amérique et l'Europe du Nord, ou l'impénétrable Asie. C'est sur ce double objectif que les vignerons des Côtes ont mandaté un homme de talent, Christophe Chateau, pour partir à la conquête d'une image.

Les vins du bien vivre

Le directeur de l'appellation vise le doublement de l'exportation (de 12 à 25 % de la production). « Ou bien nous cherchons des millions que nous n'avons pas pour l'affichage, ou bien nous faisons parler de nous en trouvant des prescripteurs qui tombent amoureux de nos vins. »

Comment rendre amoureux ? En créant du désir, des rencontres surprenantes, un réseau gourmand.

Ce rôle était taillé sur mesure pour Jean-Pierre Xiradakis, le chef de la Tupina à Bordeaux, qui porte toujours en sac à dos un quintal de convictions gasconnantes. Le célèbre JPX représente le bien vivre et le bien manger du Sud-Ouest, qui subjugue les maigres et agite les contemplatifs. Il compte aussi beaucoup d'amis dans les casseroles de luxe. L'idée, c'est de rapprocher les vins de Côtes de la belle cuisine, sur tous les continents.

Ensemble, les deux flibustiers écument le monde pour trouver des jeunes chefs prometteurs qui proposent un repas façon Tupina. Aux États-Unis, ils se sont associés à la fondation Jean-Louis Palladin, le chef gersois dont le souvenir parfume encore Washington et Las Vegas. Les Côtes de Bordeaux sélectionnent les meilleurs cuisiniers, invités plus tard sur les lieux à venir s'imprégner des richesses gastronomiques et oenologiques.

Les Côtes du Hubaï

Que trouver de plus beau qu'un dîner d'intronisation dans la confrérie des Côtes de Bordeaux quand on habite Hong Kong ? Autour de la table, journalistes et distributeurs découvrent des vins d'un excellent rapport qualité-prix, qu'ils n'avaient jamais vus. On appelle cela des leaders d'opinion.

« Nous sommes en adéquation avec la demande, souffle Christophe Chateau. Après la mode des vins très boisés, très extraits, le consommateur revient à des vins de plaisir. Les Côtes, majoritairement Merlot, séduisent par le fruit, la rondeur et la souplesse. Les blancs se signalent par la puissance aromatique. Ce ne sont pas des bêtes à concours, des vins de spéculation. Ils sont là pour être bus. »

En Chine, à Wuhan, ils ont rencontré le plus grand importateur d'alcool blanc de la province du Hubaï. Cet entrepreneur éclairé veut créer une marque de vins « Côtes de Bordeaux » diffusée par 1 500 commerciaux. Partout, de Los Angeles à Djakarta et de Montréal à Singapour, la performance des deux voyageurs tend à démontrer que pour vendre du vin aujourd'hui, il faut soulever les montagnes, traverser des marigots à la nage et, quand c'est possible, marcher sur l'eau.

Prochain défi pour JPX : faire entrer les Côtes de Bordeaux au Vatican.

Auteur : Christian Seguin
http://www.sudouest.com