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Le pacherenc est affaire de patience

Messagepar Jean-Pierre NIEUDAN » Sam 27 DĂ©c 2008 07:12

Il reste cinq hectares à vendanger, cinq petits hectares saupoudrés sur les coteaux gersois qui cernent le village de Viella. Cinq hectares, six producteurs qui incarnent la relève du métier. « On en tirera de 2 000 à 9 000 bouteilles », estime André Dubosc, le fondateur des Producteurs Plaimont, la coopérative qui regroupe 55 % de l'appellation Pacherenc du Vic-Bilh. Lundi ainsi que mercredi, tous ceux qui voudront jouer du sécateur avant de faire la fête seront les bienvenus dans le vignoble. Il ne faut pas traîner. Malgré les filets qui recouvrent les rangs, les grives prélèvent leur dîme. Avec la raréfaction de la nourriture alentour, elles se glissent au pied des ceps et en arrachent les grains. « On peut utiliser des canons pour les effaroucher mais pas ici, pas aussi près des habitations », soupire Sabine Laborde, une vigneronne dont la parcelle touche le bourg de Viella.

Pas de crainte superflue, il restera suffisamment de raisins pour cette récolte de la Saint-Sylvestre. L'opération perdure depuis 1991, date à laquelle les producteurs de pacherenc s'y sont lancés par le plus grand des hasards. « On avait eu des gelées de printemps, les raisins étaient restés verts. L'année était perdue. Et puis, le 15 décembre, à la surprise générale, les raisins étaient encore debout. On était une douzaine, on a décidé d'attendre et de les ramasser. On a fait la fête, et puis voilà », se souvient André Dubosc, aujourd'hui retraité.

Et puis voilà quoi ? Un blanc moelleux à l'acidité comme gommée, un pacherenc nettement différent de celui qu'on produit sur les 250 hectares de l'appellation, à cheval sur trois départements : le Gers, les Hautes-Pyrénées et les Pyrénées-Atlantiques. Si les quantités récoltées à la faveur de ces derniers coups de lame restent limitées, l'occasion est belle de réaliser un joli coup marketing tout en fédérant les vignerons autour d'un réveillon commun.

La relance de l'appellation

Le pacherenc en a besoin, sa notoriété demeure encore faiblarde auprès du grand public. Jouxtant le Saint-Mont-Blanc (anciennement Côtes de Saint-Mont) et le Madiran rouge, cette appellation bénéficie d'une relance encore récente.

Entre 1820 et 1850, 150 000 hectares de vigne couvraient le pays. Les blancs étaient embarqués sur l'Adour au port de Saint-Mont pour cingler vers le nord de la France, la Hollande, la Belgique et l'Angleterre. Après guerre, la production de masse a failli tout emporter. Les cépages locaux ont été sauvés par une poignée de passionnés.

À partir de 1975, on a replanté sur ce relief chahuté qui s'ébroue à la pointe du bassin de l'Adour. « On a commencé à voir poindre des vins intéressants en 1982-1985 », juge André Dubosc, l'un des acteurs de ce sauvetage patrimonial.

Mais les vendanges de la Saint-Sylvestre ne se résument pas à un coup de projecteur bien venu. Elles obéissent aussi à l'histoire oubliée du terroir. « Les cépages du pacherenc sont des cépages nés ici, le gros manseng, le petit manseng, l'arrufiac et le petit courbu. Ils ont toujours été vendangés tard. On a retrouvé un édit de 1745 qui encadrait les vendanges entre le 4 et le 15 novembre, pendant l'été de la Saint-Martin. Les anciens avaient l'habitude de ramasser les derniers raisins quand ils allaient à la chasse au lièvre, l'hiver », explique-t-il.

Flétrissure du grain confit

Cette semaine, c'est un temps idoine qui a baigné les vignes du Vic-Bilh sur les épaulements de la campagne gersoise. Un ciel clair, du givre qui craque sous les pas au petit matin et un franc soleil en journée pour sécher les grappes. « Parfait pour que les grains perdent leur eau », commente Paul Dabadie, un autre jeune producteur dont les parcelles dégringolent les dernières pentes du village de Viella.

Cette nouvelle génération de vignerons ne recherche pas la pourriture noble des brouillards d'automne. Comme leurs homologues québécois qui tracent le sillon du (très rémunérateur) vin de glace, ils visent la flétrissure du grain confit. Celui qui concentre les arômes et promet des millésimes d'avenir. « Je me souviens, quand j'étais enfant, on allait déterrer des bouteilles recouvertes pour rester à température constante, à 13 degrés. Elles avaient 50, 60, 100 ans ! Magnifique ! » s'enthousiasme André Dubosc. Pour les héritiers, la barre est haute.

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Jean-Pierre NIEUDAN
 
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