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[Jean-Pierre NIEUDAN]

Frédéric et David Giachino font du vin de Savoie. Leur particularité ? Ils ont entamé une reconverstion vers l'agriculture biologique

À dix-huit ans, Frédéric Giachino le décide : plus tard, il sera vigneron ! Il se forme alors à la viticulture et la vinification, et travaille les vignes de son grand-père, puis les reprend. Il y a quatre ans, il est rejoint par son frère, David. Ils décident alors de s'associer, et d'abandonner la méthode conventionnelle pour partir dans la viticulture biologique. À 43 et 40 ans, Frédéric et David sont à la tête d'un domaine de huit hectares à Chapareillan et aux Marches. « Nous sommes allés le plus loin possible dans ce qu'il était possible de faire dans le conventionnel, explique Frédéric Giachino. ensuite, nous avons été parmi les premiers à nous intéresser à une viticulture raisonnée. Nous voulions aller au bout des choses, et le bout de cette démarche, c'est le bio. »

« Mais ils sont fous ! »
Pour l'instant, seul le raison est biologique, le vin ne le sera que d'ici un an. Le temps de finir la reconversion. Travailler ses vignes en « bio » signifie plus de soins : compter environ 20% de travail en plus dans la vigne, soit une personne supplémentaire. Les vignes sont enherbées, sauf sous le rang en lui-même, et les viticulteurs n'utilisent aucun produit résiduel, aucun germinatif et aucun insecticide. « Pour traiter nos vignes, nous utilisons des traitements de contact, développe David Giachino. Souffre et cuivre, le moins possible, et des tisanes et des purins de plantes, comme l'ortie. Il y a toujours un équilibre dans la nature, nous devons le respecter, et laisser les plantes se défendre. » Le travail du sol est l'un des aspect les plus compliqués de cette viticultutre : « On butte, on débutte, on repasse... Nous travaillons comme les anciens, raconte Frédéric Giachino. On essaie de comprendre pourquoi ils faisaient les choses, et pourquoi cela marchait. D'ailleurs, certains anciens, nous voyant travailler comme eux à l'époqe, se disent : « Mais ils sont fous! » Nous n'inventons rien : tout ce que nous faisons, ils l'ont fait. » Cette branche de la viticulture savoyarde, qui regroupe une douzaine de viticulteurs, comporte malgré tout une partie de risques. Car les vins biologiques sont décalés. Avec ce mode de traitement, il existe un effet millésime, et il faut sans cesse adapter la vinification au raisin récolté. Difficile de promettre aux clients un vin identique à chaque fois...

Sortir le vin de Savoie du pichet
« Il y a un nouveau regard à avoir sur la viticulture, insiste Frédéric Giachino. Le souci, avec le bio, c'est le temps que cela prend, les risques que cela implique pour le viticulteur... Quand c'est facile, que le vin est vendu cher, on peut tout se permettre, ce qui est loin d'être le cas dans la plupart des cas. Et faire du bio dans nos régions est beaucoup plus difficile que dans le Sud, par exemple. »
Pour Frédéric et David, le vin bio est le laboratoire des vins du futur : « Il n'y a plus ces viticulteurs fokloriques, comme par le passé. Les grands vins sont des vins bio. Et les conventionnels viennent nous voir pour observer nos techniques. Il faut être très pointu pour faire du vin bio, c'est l'avenir de la filière. » Et si le vin bio n'est pour l'instant pas très connu en Savoie, les Giachino travaillent à l'export, car les pays Nordiques sont très demandeurs de vins naturels. Et pour Frédéric et David, il n'y a pas de mystère : il faut redonner leurs lettres de noblesse aux vins de Savoie, trop souvent catalogués comme des « petits vins » : « Il faut trouver un équilibre économique, c'est le plus important, et cet équilibre ne se fera que vers le haut. Un bon vin, cela coûte cher. Et il y a des bons vins en Savoie. » Les frères Giachino espèrent désormais que les restaurateurs finiront par sortir les vins de Savoie des pichets pour les remettre en bouteilles sur leurs tables.

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