Le rendez-vous incontournable de la planète vin s’est achevé jeudi dernier. Il attire les professionnels du monde entier venus faire du business. Vinexpo tombait en pleine redistribution des cartes dans un secteur impacté lui aussi par la crise économique et où l’on se met à rêver « d’économie réelle ».
«L’heure n’est plus à la morosité: la confiance est revenue de part et d’autre, les acheteurs sont aux achats et le moral des négociants et des producteurs repart. Nous ne pouvons que nous réjouir de cette 15ème édition de Vinexpo, très qualitative et commercialement très active après plusieurs mois de doute sur le marché international ». Xavier de Eizaguirre, le Président de Vinexpo se veut résolument optimiste au lendemain de la fermeture.
47 000 visiteurs de la filière venus de 135 pays ont répondu présent. Avec près de 35% de visiteurs hors France sur les 4 premiers jours, le salon a été fréquenté par plus de 15 000 étrangers, et confirme son positionnement international.
Tout de même, cette manifestation d’une importance capitale pour le marché mondial du vin se déroulait au moment où les vins de Bordeaux enregistrent une baisse de 30% des transactions selon la Chambre d’agriculture de la Gironde. Ce que confirment de nombreux propriétaires à l’image de Jean-Luc Zell, le directeur du château d’Agassac à Ludon (Médoc) : « C’est une année assez difficile. Pour notre part, nous vendons en primeurs aux négociants. Le problème est celui des liquidités des intermédiaires. Il nous faut faire le dos rond et attendre… ».
« Les traiders anglais sont au chômage »
« C’est comme au rugby, il faut retrouver les fondamentaux ! ». François Lévêque est le président du Syndicat régional des Courtiers en Vins et Spiritueux de Bordeaux.
Il porte un regard lucide, mais non dénué d’un certain optimisme sur la situation de la viticulture : « Depuis octobre 2008, on s’enfonce dans la crise car les acteurs sont frileux et ne veulent pas prendre de position sur les stocks. Dans le bordelais, après 5 ans de crise et de campagne d’arrachage, nous avions retrouvé un équilibre. C’était bien sûr avant l’automne 2008… ».
Pour cet observateur des marchés internationaux, c’est sur ce segment que les répercussions sont les plus fortes : « Les prix ont baissé, ce qui permet aujourd’hui d’intéresser des clients européens amateurs et non spéculateurs. On les avait laissés tomber au profit de la clientèle des traiders britanniques qui aujourd’hui cherchent du travail… ».
Autre défaillance, celle des fonds de pensions qui trouvaient dans certains grands noms (qui représentent seulement 5% des propriétés bordelaises) des placements juteux…
« La consommation mondiale augmente de 2% »
Alain Vironneau, le Président du CIVB se réjouit pour sa part du « signe positif » envoyé par les responsables politiques sur l’utilisation d’Internet : « Nous avons ouvert ce salon dans une ambiance très compliquée. Il existe cependant des signes qui permettent d’envisager l’avenir avec un certain optimisme : La consommation de vin augmente de 2% au niveau mondial et la production stagne ». Principale revendication du président du CIVB : un engagement plus important de l’Union Européenne pour le secteur : « Les fonds européens doivent être employés pour l’aide à la viticulture dans nos frontières. A Bordeaux, nous réalisons 60% de nos affaires en Allemagne et en Belgique. L’Europe doit comprendre qu’il y a intérêt à investir sur le marché intérieur ! ».
La crise n’est pas finie…
Dans un contexte morose, les grands acteurs du marché avaient dans un premier temps hésité pour beaucoup à venir à Bordeaux. Finalement, des affaires ont pu se conclure dans les allées du salon où à l’occasion de soirées privées organisées ici et là dans de nombreuses propriétés bordelaises. Reste que pour les plus petites exploitations (95% des propriétaires à Bordeaux), la crise n’est pas finie... Nombreux sont ceux qui estiment que le prix de 800 euros le tonneau est très insuffisant dans un pareil contexte.
Selon certains observateurs, le paysage viticole change rapidement au profit de regroupement en propriétés plus conséquentes.
Eric MOREAU
http://www.echos-judiciaires.com/econom ... a6383.html