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Bordeaux primeurs 2008 : à quand la baisse ?

Messagepar Jean-Pierre NIEUDAN » Mer 15 Avr 2009 17:30

Dans un marché touché par la crise, les prix devraient diminuer de manière significative.Y compris au plus haut niveau. Une occasion à saisir pour les consommateurs.

Acheter ou ne pas acheter, telle est la question pour les bordeaux 2008. Pour le négociant qui est en première ligne, il lui faut évaluer la qualité intrinsèque du millésime, ausculter les clients, interpréter l'état du marché et, de surcroît, apprécier les dégâts de la crise, voire sonder le moral des troupes. Pas simple. Il est vrai que les vins ne sont pas encore en bouteille - ils ne le seront que dans un an ou deux - et qu'il faut se faire une opinion des vins, souvent par personnes interposées. En bout de ligne, le simple amateur de vin se pose à peu près les mêmes questions.

D'habitude, 5 000 acheteurs potentiels font leur déplacement annuel à Bordeaux pour répondre à ces questions. Entre-temps, la crise est passée par là. Du coup, combien sont-ils ? « La fréquentation de nos sites n'a baissé que de 2 %, avec un peu moins d'Américains et plus d'Asiatiques », confie avec soulagement Jean-Marc Guiraud, le directeur de l'Union des grands crus qui organise l'essentiel de la manifestation.

Et la qualité des vins ? « Certes, ce n'est pas un millésime exceptionnel, mais il se situe dans les très bons millésimes », soulignent d'une seule voix Sylvie Cazes, la nouvelle présidente de l'Union, et Patrick Maroteaux, l'ancien président. Évidemment, on n'a jamais vu une instance officielle clamer qu'un millésime n'est pas fameux.

Des millésimes moyens

L'année dernière, déjà, le même son de cloche résonnait au même endroit. Maintenant que les 2007 sont vendus à la propriété, les langues se délient et tout le monde s'accorde à dire que le millésime 2007, s'il a produit des vins fort honnêtes, est le plus faible des dix dernières années et rejoint le 1997 dans le purgatoire des vins moyens. Sauf que le millésime 2007 a été vendu bien trop cher par la propriété et que le consommateur final n'en veut pas, ce qui fait désordre. La crise n'a rien arrangé, et les négociants se retrouvent avec leurs stocks sur les bras. Alors pourquoi se charger, en plus, des 2008 ?

François Mitjaville, l'avisé propriétaire du château Le Tertre Rotebœuf à Saint-Émilion, résume bien les caractéristiques du 2008 : « Du point de vue de la météorologie, 2008 et 2007 sont très similaires. Mais les vins sont bien différents, sans que, pour la première fois depuis trente ans, l'on sache trop pourquoi : si les 2007 donnent des vins suaves et faciles, à boire rapidement, les 2008 sont plus tanniques et plus denses, ils vieilliront mieux. » Le sentiment général des dégustateurs professionnels est que le 2008 est un millésime moyen sans plus, mais non dénué de qualités, comme la fraîcheur et une bonne capacité de garde. Il faut tenir compte du savoir-faire des producteurs, qui savent maintenant présenter des vins charmeurs en échantillon, une qualité qui ne se retrouve pas toujours en bouteille, comme peuvent le constater des acheteurs des 2005, qui se sentent un peu floués. Mais s'ils ne sont pas chers, pourquoi pas… Et puis, comme toujours, les meilleurs producteurs ont produit de très jolis vins, et il serait malséant de les laisser tomber alors qu'ils ont dominé tous les écueils de ce millésime difficile.

Reste, comme toujours, la grande inconnue des prix. Il est maintenant établi que les 2006 et les 2007 ont été survendus : le consommateur final renâcle à en payer le prix, et la crise n'a rien arrangé. Les circuits de distribution en regorgent, comme le souligne, un rien provocateur, l'expert anglais Robert Joseph, qui n'a même pas fait le voyage à Bordeaux : « On se passera très bien des bordeaux 2008 ! » La chute de la livre anglaise, qui enchérit les prix de 50 %, n'arrange rien à l'affaire. Heureusement, tous les experts anglais ne partagent pas le même avis, notamment Steven Spurrier, qui précise : « Il existe de très beaux vins, en particulier au niveau des premiers crus. »

Des prix insensés

Tous les producteurs ont une petite idée sur les prix et s'en expliquent volontiers : « Moi, j'ai toujours été raisonnable, et il n'y a aucune raison que je baisse mon prix. » Même les plus déraisonnables tiennent ce discours bien rodé. Tous les yeux convergent vers les premiers crus, qui ont été à la base de la dérive de la place de Bordeaux vers des prix insensés et qui sont les premiers secoués par la crise. Alors que le prix de sortie du Latour 2001 était de 86 €, le 2006 était à 464 € et le 2007 du même ordre. Bref, le prix en francs se retrouve en euros. Jolie culbute.

Baisseront-ils en 2008 ? Le marché attend une baisse significative, y compris au plus haut niveau, celui des premiers crus, pour se relancer. Pour ne pas s'y soumettre, les producteurs mettent systématiquement en avant la faible quantité de récolte des 2008. Mais il faut la relativiser. Si à peu près tous les crus ont été touchés par une floraison étalée, qui a un peu baissé les rendements, qui restent tout de même confortables, on met beaucoup en avant les quelques crus touchés par la grêle. Les déclarations des récoltes en mairie ne sont pas toujours en accord avec les discours tenus dans les propriétés, qui sont passées maîtres dans le jeu de poker menteur. D'ailleurs, l'argument n'a jamais été réversible : aucune propriété n'a jamais baissé ses prix parce qu'elle avait effectué une jolie récolte en quantité.

La conclusion s'impose d'elle-même au consommateur. Ceux qui manquent de vins pourront acheter les réussites des 2008, il en existe et nous les détaillerons quand les prix seront connus et resteront raisonnables. Sans une franche baisse des prix (20, 30, 40 %), les autres pourront s'en désintéresser, car la braderie des 2007 et même des 2006, dont la qualité est au moins équivalente, voire supérieure, est dans l'air aux prochaines foires aux vins. À moins de s'intéresser aux quelques grandes réussites qui, du coup, seront dans un très bon rapport qualité-prix. À suivre, donc…

Bernard Burtschy
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Jean-Pierre NIEUDAN
 
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