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Jessy Bodec, sommelier conseil

Messagepar Jean-Pierre NIEUDAN » Jeu 25 DĂ©c 2008 03:12

Elu meilleur sommelier d’Israël en 2005, Jessy Bodec parle de son métier, des Israéliens et du vin et du vin israélien.

Comment un trentenaire d’origine parisienne conquiert-il, en 2005, le trophée Yarden, qui récompense tous les deux ans le meilleur sommelier d’Israël ? Grâce à sa qualité et à son accent de Français bien sûr ! Conjugués, certes, à quelques compétences que nul ne put lui disputer cette année-là… L’histoire vous semble un brin exagérée ? Elle l’est. Et cependant…

« Après mon service militaire, explique Jessy Bodec, j’ai quitté Jérusalem pour étudier l’économie à l’université de Cornell, dans l’Etat de New-York — un établissement prestigieux mais très onéreux, j’ai dû travailler pour financer mes études ». Jessy trouve un petit boulot de serveur dans un restaurant du coin. Une aubaine pour les propriétaires : « Un Français, ont-ils pensé, s’y connait forcément en vin, on m’a bombardé sommelier ». Et tant pis si tel n’est pas le cas, la pointe d’accent du « Frenchy » sera son meilleur argument face aux clients ! Consciencieux, il entame son apprentissage sur le tas, écume les « wineries » alentours et dévore les ouvrages spécialisés.

Retour à Jérusalem, trois ans plus tard. Il n’est plus un novice et trouve rapidement à s’employer chez Michael Andrew, restaurant de poissons réputé du quartier de Yémine Moshé. Même cause, mêmes effets. La jeune recrue se trouve en charge des vins et noue ses premiers contacts avec les grandes caves israéliennes : Carmel, Ramat haGolan, Binyamina mais aussi Barkan et Dalton, en pleine ascension.

Au terme d’une nouvelle escapade à l’étranger, dont un intermède parisien à l’Institut du Vin afin de « formaliser un savoir essentiellement empirique », Jessy est embauché en 2001 au célèbre restaurant du chef Haïm Cohen, Keren, à Jaffa. « Cela a été ma meilleure école. Auprès de la chef sommelière Hadas Ezer, j’ai vraiment appris ce qu’est le service du vin et à cerner en deux trois questions les attentes des clients».

Suivront Raphaël puis Moul Yam, deux des plus fameux restaurants de Tel-Aviv, sinon d’Israël. Et désormais en première ligne : « En devenant chef sommelier, j’ai assumé de nouvelles tâches : constituer et gérer la cave, négocier avec les fournisseurs, élaborer une carte. Le trophée Yarden est venu récompenser l’ensemble du savoir une dizaine d’années».

En parallèle, Jessy crée en 2003 sa propre société, The Wine Society of Israel.

Fort d’une expérience variée et d’un joli carnet d’adresses, il y inaugure son activité de sommelier conseil — sa seule occupation depuis 2006. Il propose ateliers de dégustation, formations de sommelier, élaboration de cartes des vins, conseil aux collectionneurs, conduite de voyages gastronomiques et viticoles à l’étranger… sans oublier la gestion en sous-traitance du département « vin » de plusieurs restaurants.

Cette expérience l’autorise à jeter un regard pertinent sur le métier de sommelier en Israël tout comme sur le rapport des Israéliens au vin ou la production vinicole locale:

« Les sommelier en Israël pèchent souvent par amateurisme. Ils ne connaissent pas assez leurs produits et considèrent que leur job consiste à placer les bouteilles les plus chères. Mais la situation évolue dans le bon sens, les meilleurs restaurants tirant les autres vers le haut : les premiers ont compris qu’un bon sommelier doit être bien formé et bien rémunéré parce qu’il permet de vendre davantage de bouteilles et aussi de meilleures bouteilles. A cela s’ajoute une vraie volonté d’apprendre et d’aller de l’avant. La prise de conscience est progressive mais réelle.

Les Israéliens, toutes catégories confondues, s’intéressent de plus en plus au vin et pas seulement aux rouges, les blancs gagnent en popularité et même le rosé commence à séduire. Par ignorance ou snobisme, beaucoup s’orientent encore, au moment du choix, vers des marques, des « étiquettes » mais il y a fort à parier, à en juger, par exemple, à la curiosité des jeunes pour le vin que cette culture va aller se diffusant. Je suis optimiste!

Je tire mon chapeau aux domaines qui ont été les vrais précurseurs de la qualité dans les années 80 et 90 au sein d’un vignoble relativement sinistré. Bravo aux Castel, Margalit et autres caves du Golan ! Ils ont ouvert la voie et suscité des vocations, à observer la multiplication des domaines dits « boutique ». La compétition est saine : elle fait progresser la qualité tout en contribuant à la baisse des prix.

Israël compte nombre de vignerons de talents. Uri Hetz chez Château Golan, Assaf Paz chez Binyamina et Vitkin, les Pelter dont les blancs purs, sans ce boisé caricatural hélas si répandu ici, sont des modèles à suivre. De jeunes domaines, tels Clos de Gat ou Yatir, inspirent le respect. Ce que j’espère des vignerons israéliens à l’avenir ? Qu’ils cultivent davantage de cépages locaux, à l’image du Carignan, ou adaptés au climat et à la gastronomie locales, le viognier par exemple. On trouve ici trop de vins, pourtant issus de caves différentes, identiques à s’y méprendre : les viticulteurs doivent désormais porter leur effort sur l’identité de leurs produits .

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Jean-Pierre NIEUDAN
 
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