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[Jean-Pierre NIEUDAN]

Le Languedoc, à l’image des grands vignobles français, entre dans une démarche de hiérarchisation. Les vins seront désormais classés en trois catégories. L’AOC Languedoc formera le socle de la pyramide, les grands vins le cœur et les grands crus le sommet.

Le conseil interprofessionnel des vins du Languedoc (CIVL), à l’origine de cette proposition, veut mettre de l’ordre dans son appellation pour clarifier son image auprès du public. « Nous faisons ce que les Bourguignons ont fait il y a 150 ans, explique Jérôme Villaret, délégué général du CIVL. Il faut changer notre façon de penser. » Une orientation semble-t-il attendue par la profession. En attendant que l’Inao autorise une nouvelle mention sur l’étiquette, le consommateur devra se fier au prix. Après un an de travail, une commission composée de producteurs et de négociants a déterminé les critères des catégories. Les syndicats de cru sont invités à signer une charte d’engagement et à se hisser au niveau requis dans les deux ans.

Cinq l’ont déjà signée, dont le syndicat Minervois-La Livinière. Sa présidente, Patricia Boyer-Domergue, adhère totalement. « Il faut à tout prix hiérarchiser les vins du Languedoc pour avoir une image claire de ce qu’on peut trouver. Les gens font l’amalgame : il y a beaucoup de petits prix mais aussi de très beaux terroirs. Une exigence de qualité accompagne les grands crus. La qualité n’a pas de prix. Le consommateur décidera de suivre ou pas. »

Le syndicat du cru Pic Saint-Loup n’a pas encore signé le document qui devrait être validé à l’issue d’une prochaine assemblée générale. « La segmentation est importante mais cette hiérarchisation n’est pour l’instant que commerciale », note Jean-Marc Ravaille. Le président émet une petite réserve : « Il ne faut pas que cela empêche les terroirs d’établir leur propre classification. » Il ne faudrait pas que la pyramide se transforme en labyrinthe pour le consommateur.

Autre question soulevée par certains producteurs : le prix. Si la plupart des domaines respectent la fourchette établie, certains rechignent à augmenter celui de certaines cuvées. « Ce serait priver le grand public d’un vin de qualité et le réserver à une élite », assure Philippe Coston, producteur bio à Puéchabon. Vincent Goumard, président des Terrasses du Larzac, relativise : « C’est une hiérarchisation des appellations, pas des domaines. » Reste que cette hiérarchisation est un pari dont l’objectif est de tirer l’AOC Languedoc vers le haut.

Jean-Philippe Granier, directeur de l’AOC Languedoc : « Un grand cru à 10 €, ce n’est pas du luxe »

Comment est née l’idée d’instaurer cette hiérarchie ?

Il existe un flou au niveau national au sujet des grands crus en France. Les critères diffèrent d’une région à l’autre. Le Languedoc fixe à son tour un prix minimum et des critères de qualité. Et à l’Inao d’édicter une nouvelle règle.

Cela répond à une attente des producteurs ?

Ce sont des vignerons à la base qui sont allés voir Frédéric Jeanjean, le président du CIVL, pour initier une nouvelle logique commerciale : fondre le vrac dans le négoce et cibler plus précisément le reste de la production. C’est la première fois que les vignerons de l’Aude et de l’Hérault sont d’accord. Ce projet mobilise les vignerons autour d’une dynamique, complémentaire aux différents terroirs. L’interprofession va porter la bonne parole partout. Avant les domaines étaient mis en avant, aujourd’hui ce sont les syndicats. C’est une traduction collective, pas une communication par chapelle.

Comment le consommateur va-t-il réagir surtout si le prix augmente ?

Un grand cru à 10 €, ce n’est pas du luxe, c’est la réalité. Aujourd’hui on trouve des produits superbes à des petits prix. A l’heure actuelle seul un connaisseur peut s’y retrouver. Pas un Chinois. Un grand cru ou un grand vin, c’est plus facile à comprendre.

Cathy Soun
http://www.midilibre.com/articles/2011/ ... 89358.php5