Un colloque avait Ă©tĂ© prĂ©vu Ă l’occasion du 1100 e anniversaire de la fondation de Cluny, mais il n’y a pratiquement pas de spĂ©cialistes français sur la thĂ©matique de Cluny et le vin. Ă€ part quelques travaux de mĂ©diĂ©vistes, rien n’avait Ă©tĂ© fait sur l’époque moderne qui reste Ă dĂ©fricher », expliquait Jocelyne PĂ©rard, titulaire de la Âchaire Unesco Culture et Âtradition du vin, en prĂ©ambule de la confĂ©rence « Vignes et vins dans le patrimoine Âbourguignon de l’abbaye de Cluny », d’Annie Ruget et Pierre Goujon.
C’est justement ce travail précurseur que présentaient Annie Ruget et Pierre Goujon qui se sont basés sur les commissions d’évaluation des parcelles avant la vente des biens nationaux, en 1790. Ces premières recherches montrent une première rupture, entre le Moyen Age et l’époque moderne. Alors que les fermes et domaines permettaient de nourrir la vaste abbaye à sa fondation, ce n’était plus le cas à la veille de la révolution, puisqu’il ne restait qu’une quarantaine de moines. Dès lors, ces domaines obéissaient à des impératifs commerciaux. Essentiellement situés dans le Mâconnais, ils présentaient une grande homogénéité dimensionnelle. Les vignes ne représentaient que 30 à 40 % des surfaces cultivées. L’un des plus importants était le domaine de Montrachet (Saône-et-Loire) avec 17 hectares de vignes.
Le marché en région parisienne
Si la présence des vignes restait relativement modeste, elle ne préjugeait en rien de la production viticole dont l’essentiel était vendu en région parisienne, dans le nord de la France et en Belgique, puisque les droits étaient prohibitifs pour entrer sur le marché lyonnais. Il s’agissait principalement de grands ordinaires de vins de Mâcon depuis le XVII e siècle, issus du cépage “fin gamay”.
À la révolution, notaires, négociants et riches fermiers seront les commissaires évaluant ces parcelles pour s’en arroger les meilleures parties. Les surfaces en vignes vont alors s’étendre, comme à Berzè-la-Ville, où elles passeront de 11 à 20 hectares et de cinq à vingt parcelles, entre 1791 et 1817. En Côte-d’Or, le domaine situé à Gevrey-en-Montagne (ancien nom de Gevrey-Chambertin) était propriété personnelle de l’abbé Dominique de la Rochefoucault, en 1789. Au moment de la vente des biens nationaux, l’expertise montre que le bâti était en très mauvais état.
Le domaine comprenait 3,21 hectares de vignes, 12,66 hectares de terres et 5 hectares de prés. Ces vignes étaient sans surprise, « situées en bons climats : 59 ares en Chambertin, 4 ouvrées en Marzy ». En 1791, un parlementaire dijonnais achetait château, domaine et pressoir pour 40 000 livres. Impécunieux, il cédait la place à un marchand, demeurant Aux Baraques, à Gevrey, avant que le château ne soit racheté par la municipalité.
Franck Bassoleil
http://www.lejsl.com/fr/accueil/article ... ertin.html