EPERNAY (Marne). Presque trois mois sans pluie… Véritable sujet d'affolement pour la majorité des agriculteurs, cette situation n'a rien d'inquiétant pour les vignes.
Trop beau, trop chaud, et surtout, trop sec. Les grandes cultures souffrent, les agriculteurs s'inquiètent, mais la vigne, elle, se porte bien. « Nous dormons sur nos deux oreilles », confirme Dominique Moncomble, directeur technique du Comité interprofessionnel du vin de Champagne (CIVC).
Tout simplement parce que la vigne affectionne les sols secs, ou disons, « modérément humides ». Alors même s'il n'est tombé que quelques gouttes ces trois derniers mois, l'anxiété n'est pas de mise. Les sondes installées en profondeur montrent en effet un sol sec sur les 30 premiers centimètres. Mais les vignes prennent leurs racines plus profondément encore.
« Par ailleurs, en Champagne, les vignes se trouvent souvent sur des terrains en craie, une matière qui agit comme une véritable éponge, poursuit Dominique Moncomble. L'eau remonte par capillarité. C'est pourquoi pendant la canicule, en 2003, la vigne était toujours verte alors que tout avait grillé autour. »
Tout peut basculer
La sécheresse actuelle présente d'autres avantages, pour la Champagne viticole du moins, puisqu'elle retarde l'apparition du mildiou. « La contamination primaire a du mal à se faire, acquiesce Gilles Lancelot, vigneron à Cramant. Et de notre côté, nous ne traitons qu'avant la contamination secondaire. » Tant que la pluie n'arrive pas, nul besoin de traiter donc. « Et ne suivons pas les premiers tracteurs qui sortent quand ce n'est pas necéssaire ! », encourage-t-il. Le climat actuel offrirait en revanche un terrain plus favorable au développement de l'oïdium, un champignon dévastateur pour la vigne. L'oïdium, qui fait son nid des nuits fraîches et des journées plutôt chaudes, présente la particularité d'être difficile à appréhender. « Alors il faut rester très prudent », poursuit Gilles Lancelot, même s'il n'y pas d'alerte pour le moment. S'ils sont loin des préoccupations des autres agriculteurs, les vignerons n'en gardent donc pas moins les yeux rivés vers le ciel, eux aussi. Car si la vigne s'est développée très tôt - « environ quinze jours en avance pour le moment » - la météo reste capricieuse. « Et bien que le risque de gel s'éloigne, il est toujours présent », précise Dominique Moncomble.
Quant à la pluie, « elle pourrait ne pas tomber d'ici juillet, ou même août, cela ne mettrait pas la récolte en péril ». Mais on parlerait alors d'un possible état de « stress hydrique ». « Ce qui donnerait un profil de millésime un peu différent, similaire aux années 1976 ou 2003 par exemple », poursuit-il.
Nous n'en sommes pas là puisque tout peut changer d'un jour à l'autre. « En 2007, on nous annonçait des vendanges la seconde quizaine du mois d'août, se souvient Gilles Lancelot. Finalement, nous avons vendangé en septembre… »
J.G.-A.
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