Index du forum ‹ Les rubriques ‹ Histoire du vin et de la vigne... découvrir le vin, l'aborder, s'informer ‹ Histoire de vin ‹ Presse du vin

[Jean-Pierre NIEUDAN]

C'est la préoccupation principale de tout amateur devant le linéaire, chez son caviste ou au restaurant : cette bouteille sera-t-elle qualitativement à la hauteur de l'AOC indiquée sur l'étiquette ? C'est pour rassurer le plus possible la clientèle que l'ensemble de la filière viticole française met en place depuis trois ans une vaste réforme visant à resserrer les mailles du filet.

Auparavant, pour les AOC - la moitié des volumes produits dans l'Hexagone -, tous les lots de vins sortant de la propriété étaient systématiquement contrôlés. Avec près de 97 ou 98 % d'admis, ces dégustations d'agrément ne manquaient pas de soulever des critiques acerbes. D'où une vaste réforme qui a vu le jour en 2008.

Le système est en place

Elle prévoyait l'audit en amont de toutes les propriétés viticoles afin de les déclarer aptes, ou non, à produire du vin d'appellation. Ensuite, les contrôles ne seraient plus systématiques mais aléatoires et ciblés. Y compris chez le négociant, de loin le principal metteur en marché, devant les coopératives et les vignerons particuliers.

Ce système est désormais en place. Et, en Aquitaine, la majorité des vignobles sont contrôlés par Quali-Bordeaux, organisme d'inspection tout neuf employant 25 personnes à Artigues, près de Bordeaux. Il tenait en fin de semaine son assemblée générale à Saint-Émilion, l'occasion de faire un bilan sur ce point clef de la « crédibilité qualitative » des bouteilles avant leur mise à la consommation. Sachant que le vin est soumis aux aléas climatiques, qu'il n'est pas un produit industriel et que la dégustation - pour contrôler un niveau de qualité défini - est un art subjectif et difficile qu'il faut fiabiliser.

10 000 échantillons testés

« Nous avons dégusté l'an passé près de 10 000 échantillons, prélevés en Gironde, en Dordogne et en Lot-et-Garonne. C'était 7 000 en 2009, première année pleine d'application de la réforme. Ce niveau de 10 000 devrait être la vitesse de croisière pour les années à venir », a précisé Régis de Lescar, directeur de Quali-Bordeaux.

La grande majorité des échantillons (près de 9 000) ont été prélevés en bouteilles auprès de 3 200 conditionneurs et évalués par des dégustateurs de plus en plus formés. Les résultats montrent que 17,5 % d'entre eux sont encore à la limite de ce qu'on peut attendre d'un vin d'appellation. Seuls 40 échantillons étaient mauvais et ont donc été interdits de sortie de chai.

Du côté des échantillons prélevés en vrac (750 au total), les lots « limite » étaient en 2010 à hauteur de 14,6 %. Trois étaient en zone rouge, dont un lot volumineux destiné à l'exportation mais dont l'opérateur avait mal géré les doses de SO2 (dioxyde de soufre, produit utilisé lors des vinifications).

« Nombre de lots non conformes viennent de petits opérateurs qui maîtrisent mal la mise en bouteille, notamment. Nous avons un système d'avertissement pour les mettre "sous contrôle", et ce jusqu'à une possible dégustation systématique de tous les lots les concernant », détaille Régis de Lescar. « Je note qu'en deux ans les deux tiers des opérateurs contrôlés n'ont jamais eu le moindre manquement aux exigences qualitatives demandées », ajoute-t-il.

« L'objectif est d'éliminer les mauvais lots via des contrôles ciblés et équitables, et ce sans porter préjudice à la majorité qui travaille correctement », précise Hervé Grandeau, le vigneron girondin à la tête de Quali-Bordeaux. Il faudra cependant un jour s'interroger sur ces vins « limite ». Ont-ils encore un marché ? Apportent-ils le plaisir qu'un client est en droit d'attendre d'une AOC ?

César Compadre
http://www.sudouest.fr/2011/01/25/des-v ... 8-2780.php