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Tribune de Genève -Vins bio: le naturel revient au goulot

Messagepar Jean-Pierre NIEUDAN » Mer 19 Jan 2011 09:03

Gourmands et digestes, les crus «natures» connaissent un succès galopant autant que glougloutant. Reportage à «La Beaujoloise», le gai rendez-vous des vignerons sans soufre ni douleur.

«Goûte-moi ça, c’est super glouglou!» Un jeune amateur, l’œil brillant et la babine frémissante, tend son verre à un de ses copains. Ledit verre contient le Beaujolais Village du Domaine des Côtes de la Molière. «On ne met pas un gramme de soufre et nos vignes sont bio», explique aimablement la blonde vigneronne. Intrigué, on s’approche pour tremper nos lèvres dans le breuvage. Fruit pétaradant de fraîcheur. Elégance. Tonicité. Gourmandise. Bref… super glouglou.

Nous sommes à un jet de gamay du village de Charentay, au cœur du Beaujolais et au milieu des champs, à la troisième édition de «La Beaujoloise». Soit un «salon des vins off», qui réunit la fine fleur des vignerons «naturels» de la région. Quelques collègues champenois, mâconnais et jurassiens sont également de la fête. Au total, ce sont une bonne quarantaine de producteurs qui débouchent leurs topettes, dans une ambiance de rustique camaraderie bien éloignée des rendez-vous viniques traditionnels.

Si on vous parle de cette concentration campagnarde, c’est pour au moins trois raisons. D’abord, quelques-uns des héros de ce beaujolais sans soufre ont été invités à Arvinis cette semaine (voir ci-dessous). Ensuite, les crus naturels, souvent lunatiques et décevants naguère, ont globalement fait des progrès épatants. Enfin, la vaguelette des vins bio est gentiment en train de se muer en lame de fond bachique. Maints nouveaux domaines fleurissent. Nombre d’œnophiles, las du caractère souvent standard et prévisible de la viniculture conventionnelle, se tournent en effet vers ces bouteilles écolos et vivantes, où le raisin vibre sans entrave.

Le loup blanc naturel

Une petite définition s’impose. Un vin naturel, c’est quoi exactement? «C’est un vin issu de l’agriculture biologique ou biodynamique; mais pas seulement», répond le rond et amical Emmanuel Haydens, le caviste qui le premier a soutenu, importé et popularisé cette vague de vignerons à Genève. D’abord à la Cité des Vins et désormais au Passeur de vin aux Pâquis. Biologiques mais pas seulement? «Oui, ll y a des raisins bio qui sont vinifiés de manière conventionnelle. Les vins «naturels», eux, sont réalisés avec des levures indigènes (non sélectionnées) et peu, ou pas, de soufre.»

Connu comme le loup blanc dans le milieu, Emmanuel Haydens est bien entendu chez lui à La Beaujoloise. Mais il n’est pas le seul de nos compatriotes à barboter dans le vin sans chimie. Les sommeliers du Lion d’or, de Châteauvieux et du Café de Certoux ont fait le voyage. Tout comme un tandem de cuisiniers avertis: Bernard Lonati de Ma Colombière et Bernard Livron de Certoux. «Ce sont des vins exquis, dynamiques. Mais dangereux», rigole Lonati. «Leur immédiateté et leur fruité charmeur favorisent une consommation… disons immodérée.»

Eclaboussante volupté

Au milieu des producteurs gouailleurs et des amateurs ravis, nos deux sommeliers dégustent consciencieusement. «A Genève, il y a bien sûr des clients qui restent accrochés à leurs vieux bordeaux», sourit David Grange, qui règne sur la cave du Lion d’or à Cologny. «Mais peu à peu, en expliquant aux gens, on parvient à leur faire aimer ces vins-là.» Il faut dire que quelques-uns d’entre eux procurent une éclaboussante volupté dès la première goulée. Chez Philippe Jambon, Jean-Paul Brun, Christophe Pacalet, Guy Breton et maints autres, le gamay fait montre d’une pureté et d’un sex-appeal irrésistibles.

Il y a des blancs naturels aussi. Savoureux souvent; mirobolants parfois. Les vignerons du Mâconnais, de la Champagne et du Jura conviés au salon de Charentay en font une démonstration époustouflante. Avant de mourir, il faudra penser à mettre son nez dans un savagnin du Domaine de la Tournelle ou un chardonnay des Valettes. Bref, à l’issue d’une série de frissons œnologiques, on quitte La Beaujoloise à regret. Avec un carton sous chaque bras. Et la conviction d’avoir rencontré l’avenir du vin.


Marcel est Ă  Arvinis

Le salon morgien Arvinis a invité cette année l’association «Expressions d’Origine – Domaines Châteaux du Beaujolais». Derrière cette ronflante enseigne se cachent quelques-uns des meilleurs producteurs du Beaujolais, dont trois héros du gamay sans soufre: Jean-Paul Brun, Jean Foillard et Marcel Lapierre. Ce dernier, comme Pierre Overnoy dans le Jura, pourrait d’ailleurs être le papa putatif, la figure tutélaire, de la nouvelle génération naturelle.

«C’est vrai que cela fait plus de vingt-cinq ans que l’on vinifie de cette manière, mais je n’en ai jamais fait une gloire ou une religion», sourit ce truculent sexagénaire devant un verre de rouge. «D’ailleurs, il nous arrive de mettre un peu de soufre à la mise en bouteille pour stabiliser les vins destinés à voyager. Pour nous, il s’agit simplement de réagir aux crus industriels, techniques et formatés, en retrouvant l’expression de nos sols.»

Modeste et débonnaire, Marcel Lapierre élabore des Morgons d’une précision et d’une gourmandise scotchantes. Dans une région en crise, ces rouges ont servi de modèle à la quinzaine de vignerons frondeurs mais prospères que compte aujourd’hui le Beaujolais.

❚ Arvinis, Halle CFF de Morges, jusqu’au 27 avril. http://www.arvinis.ch


Jérôme Estèbe
http://www.tdg.ch/node/302253
La vérité est dans la bouteille ..( Lao Tseu )
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Jean-Pierre NIEUDAN
 
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