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Allemagne : la double vie du vin bio

Messagepar Jean-Pierre NIEUDAN » Ven 26 Nov 2010 11:25

L'Allemagne demeure le marché le plus important du bio en Europe, et le vin n'y fait pas exception. Porté par une nouvelle génération de consommateurs qui privilégient autant les considérations de santé que de qualité, les vins bio, et en tout premier lieu ceux issus des cépages allemands, semblent promis à un bel avenir.

Aux portes de Francfort s’étend l’immense vignoble du Rheingau. Ce sont plus de 3100 hectares de vignobles qui s’étirent le long du Rhin, plantés sur des coteaux en pente douce exposés plein sud. C’est la région du Riesling. Pendant les années d’après-guerre jusqu’aux années 80, la réputation du Riesling de la région pâtit sérieusement d’une production de masse ignorant toute démarche qualitative pour la seule recherche du rendement maximum. De nombreux vignobles allemands ont en effet fait l’objet de remembrement dans les années 60 pour faciliter la mécanisation dans le travail de la vigne et y réduire les coûts d’exploitation. Une restructuration qui va de pair avec un usage intensif de pesticides et autres fongicides.
Jusqu’à ce qu’une nouvelle génération de vignerons remettent ces pratiques en question pour entamer une démarche qualitative. « Klasse statt Masse », « la qualité avant la production de masse », est devenu le maître mot de leur démarche, qui culmine avec l’introduction de la viticulture biologique.

Longtemps marginal, le « Biowein » connaît actuellement une croissance qui ne laisse plus indifférent. La surface vinicole bio est passée de 2700 hectares en 2006 à 4400 hectares en 2008, ce qui représente environ 4% de la surface vinicole totale allemande. L’engouement pour le vin bio se retrouve aussi chez un négociant comme Peter Riegel, le plus grand négociant de vins bios du pays selon ses propres termes : il affiche pour 2009 un chiffre d’affaire de 20 millions d’euros, pour un catalogue qui comprend près de 1,000 vins bios différents.
Portés par l’expansion du marché bio en Allemagne (dont le chiffre d’affaires s’élevait à 5,8 milliards d’euros en 2008), la viticulture biologique bénéficie du circuit de distribution des grandes antiennes commerciales qui n’ont pas manqué de compléter leurs gammes bio avec les vins. Car en s’introduisant dans le marché bio, jusqu’à il y a peu réservé principalement au commerce de détail, les grands distributeurs s’adressent à des couches de consommateurs autrement difficiles à atteindre. Et qui se montrent sensibles aussi bien à la thématique environnementale, que ce soit les questions de biodiversité ou de protection climatique, que de santé. Des révélations comme celle montrant le taux élevés de résidus de pesticides dans les vins français – très commentée en Allemagne – ne fait que cimenter encore un peu plus les nouvelles habitudes des consommateurs. Et des vignerons.

Des vins bios qui préfèrent rester incognito

Au « Adlerwirtschaft », la carte des vins fait référence. Franz Keller, son patron, formé notamment chez Paul Bocuse et Michel Guérard, privilégie avant tout le cépage de la région, le Riesling. « Regardez, là, sur la liste, c’est un des meilleurs vignerons de la région. Il produit des vins issus de la viticulture biologique qui sont tout simplement admirables », indique le chef. Il s’agit du vigneron Peter Jakob Kühn. Or, sur la liste ne figure aucune mention, aucun sigle indiquant une méthode viticole alternative. « Vous savez, en Allemagne, le bio est encore associé à une sorte de religion. Et les adeptes du bio ne sont pas nécessairement de grands amateurs de bons vins », explique celui qui a renvoyé ses deux étoiles Michelin « pour avoir les mains plus libres ».

Franz Keller, figure haute en couleur de la gastronomie allemande, fin connaisseur du monde viticole de la région, honore la démarche qualitative du vigneron Kühn, un des rares vignerons bios à fournir selon lui un Riesling de grande qualité : « Du jour au lendemain, il a tout arrêté pour passer directement à la viticulture bio. Non seulement bio, mais biodynamique. Il l’a fait par conviction, il pensait qu’il ne pouvait plus continuer avec les méthodes conventionnelles s’il voulait parvenir à plus de qualité. C’est une grande performance qui lui a coûté pas mal de clients au départ ». Aujourd’hui, de plus en plus en de vignerons franchissent le pas de la viticulture biologique, « mais ne vont pas jusqu’au bout ». C’est-à-dire qu’ils s’arrêtent juste avant de passer le cap de la certification. « Beaucoup redoutent un trop grand nombre de contraintes liées à la certification », explique le chef qui dresse un parallèle avec la mention française « issu de l’agriculture raisonnée ». Or une telle mention n’existe tout simplement pas en Allemagne, et l’amateur de vin doit se fier à son bon goût et son savoir culinaire s’il veut déguster un Riesling proche du bio. Ou à la carte des vins de Franz Keller.

Claire Stam Ă  Francfort (Allemagne)
http://www.novethic.fr/novethic/planete ... 131528.jsp
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Jean-Pierre NIEUDAN
 
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