Jean-Paul Nebout est à l'origine d'une expérimentation nouvelle, proposant des fûts hybrides, composés de deux espèces de chênes. Un nouveau moyen de valoriser le bois, le vin, et les terroirs.
Laurent Calmut Il n'est pas tombé dans le fût quand il était petit . Mais ce n'était pas loin ? Aujourd'hui , Jean-Paul Nebout est ingénieur forestier au CRPF (*) Auvergne, à l'antenne de l'Allier . Mais petit , déjà , il allait souvent « au bois ». « Mon grand-père et mon père avaient une scierie en montagne bourbonnaise, explique-t-il , avant de sourire : Mais il n'y avait que des résineux ».
Car la branche de Jean-Paul Nebout, aujourd'hui, c'est le chêne. Dans son bureau moulinois, il n'y a que ça. Sur les murs, dans ses dossiers, dans ses livres. Son premier ouvrage, co-écrit avec Anne Bary-Lenger (voir ci-dessous), a d'ailleurs été entièrement consacré « au premier feuillu de France. C'est une première monographie, pour évoquer l'histoire et les usages du chêne, entre chauffage ou ébénisterie ». Et fabrication de fûts.
« La texture et la structure du chêne s'y prêtent bien, explique Jean-Paul Nebout. Il permet un enrichissement du vin par les composés aromatiques du bois ». Certains travaux scientifiques ont d'ailleurs permis de mieux connaître les composés aromatiques des espèces de chêne.
« Le bois de chêne sessile confère au vin un boisé à caractère de bois de coco, vanille, café, réglisse. Le bois de chêne pédonculé donne un boisé moins aromatique, mais plus tannique ». Parti de ces constats, le Moulinois s'est également basé sur un autre : « Ces expérimentations ont toujours comparé des espèces pures qui se différencient de manière significative. Alors nous avons choisi de créer une barrique hybride ».
Entamée en 2005, l'étude s'est donc appuyée sur soixante fûts, « composés à 50 % de chêne sessile et à 50 % de chêne pédonculé, avec assemblage alterné. Chaque barrique était constituée de trente douelles issues d'arbres de la même forêt ». Vendues à neuf viticulteurs du Bordelais, du Val-de-Loire et de Gaillac, les fûts de chêne ont fait l'objet d'un élevage de dix-huit mois. Pour, au final, « un enrichissement de la palette des saveurs » : « Pour des vins blancs ou rouges, les analyses chimiques et sensorielles ont révélé la complexité et la qualité des arômes boisés obtenus ».
De quoi ouvrir de nouvelles perspectives, pour les sylviculteurs comme pour les viticulteurs. Grâce à la mise en place d'une traçabilité par bassin de production, ce procédé offre plus de garanties pour les producteurs, mais aussi les consommateurs. Une mise en commun des terroirs, pour « un métier d'excellence », qui ne peut que satisfaire Jean-Paul Nebout.
À l'heure où la filière bois traverse aussi la crise, « l'attractivité territoriale est valorisée ». De quoi permettre à l'ingénieur forestier de rappeler que « la forêt n'est pas qu'un décor ».
(*) Centre régional de la propriété forestière.
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