par Hugo B. » Lun 10 Oct 2022 14:26
Quelques mots de Bernard Burtschy sur le sujet (Ă©crits ce jour):
Foires aux vins : un rebond inattendu
Véritable institution qui fête ses cinquante ans, le système des foires aux vins était en déclin, voire passées de mode. Contre toute attente, en 2021, elles battent des records en dépassant le milliard d’euros. Nous attendons avec impatience les résultats des foires aux vins 2022 qui se terminent.
Créées en 1973 sur un parking d’un Leclerc en Bretagne, les foires aux vins ont connu une croissance interrompue pendant 45 ans pour devenir un évènement majeur du monde du vin. Le premier coup de semonce est arrivé en 2019 avec, pour la première fois de l’histoire, une baisse de 2 % en volume comme en valeur par rapport aux années précédentes. La baisse était confirmée en 2020 où, il est vrai, les foires se sont déroulées en pleine crise sanitaire sans les soirées de présentation qui font de beaux scores de vente, ni les montagnes de catalogues, plus aguicheuses les unes que les autres.
Le formidable modèle des foires aux vins s’était-il enrayé ? Contrairement à tous les pronostics, les foires aux vins 2021 ont battu tous les records en dépassant pour la première fois de leur histoire la barre symbolique du milliard d’euros selon le panéliste NielsenIQ. Les grandes enseignes s’en sortent bien comme E. Leclerc, le leader depuis toujours qui dépasse pour la première fois les 100 millions d’euros (hausse de 10,7 % avec 108 millions). Carrefour avec 92 millions, Système U (54) et Intermarché (41) affichent aussi de belles hausses dans tous les types de magasins. Les hypermarchés qu’on disait en perte de vitesse reviennent dans la course et font jeu égal avec les supermarchés. Il faut aussi souligner la montée en puissance du drive où le bio explose.
Globalement la hausse est tirée par les effervescents et singulièrement le champagne. Mais les vins rouges qui représentent tout de même une petite moitié des ventes sont à la peine. Bordeaux qui a longtemps tiré la croissance est en panne et ne représente plus qu’un quart des ventes. Le Languedoc-Roussillon, autre fournisseur de robustes vins rouges, est aussi en baisse, ce qui indique un changement dans le mode de consommation vers des vins moins tanniques et plus souples.
Montée en puissance de l’e-commerce
Cette performance de la grande distribution est d’autant plus remarquable que de nouveaux acteurs se sont installés sur le même créneau. Avec 66 millions de membres et cinq millions de visiteurs quotidiens, Veepee a vendu, mine de rien, cinq millions de bouteilles en 2021 et continue sa montée en puissance. Outre les sites généralistes comme Veepee, Cdiscount ou Amazon qui ne vendent pas que du vin, il faut aussi compter avec ceux qui sont nés avec Internet comme 1jour1vin ou encore des sites par abonnement comme Chaisdoeuvre.
Grâce au confinement, les ventes en ligne ne se sont jamais aussi bien portées : « en trois mois, nous avons gagné deux ans, voire cinq ans », affirment plusieurs responsables. Désormais, les trois quarts des consommateurs n’hésitent plus à acheter en ligne et 10 à 12 % des ventes passent d’ores et déjà par l’e-commerce.
Les nouveautés 2022
Si les foires de l’année dernière ont progressé en valeur, elles ont régressé en volume, ce qui signifie que le prix de la bouteille a progressé de près de 3 %. Le français boit moins, mais mieux, ce qui est une tendance observée depuis de nombreuses années. Pourtant, dans un contexte d’inflation, toutes les enseignes mettent avant tout l’accent sur l’accessibilité avec toute une série de vins à moins de cinq euros qui représente 30 à 40 % de l’offre.
Les vins à petits prix sont généralement issus du dernier millésime, en l’occurrence 2021 qui est miné par le mauvais temps et de quantité plus faible (près de -20 %), de qualité moindre aussi. Les enseignes ont dû faire preuve d’imagination pour trouver de bons approvisionnements, mais elles n’ont pas fait de miracles.
Les vins de qualité supérieure proviennent du millésime 2020, voire 2019, qui sont de très beaux millésimes et qui tireront les foires aux vins 2022, tout comme les 2018 et 2019 ont tiré celles de l’année dernière. Il faudra donc concentrer ses achats sur cette gamme de vins. Rappelons que le prix moyen d’une bouteille est trois fois supérieur aux autres achats de l’année.
Par ailleurs et comme toujours, chaque enseigne joue sa partition. Ainsi, Leclerc a décidé de mettre en avant de jeunes vignerons après un grand appel d’offres, Casino renforce sa gamme de grandes réserves composée de valeurs sûres. De son côté, Monoprix met en avant des vins issus des sols volcaniques et Intermarché a demandé à deux figures de l’univers du vin, le célèbre consultant Stéphane Derenoncourt et le champion de dégustation François Breteau de sélectionner leurs coups de cœur. Toutes continuent de « verdir » leur offre en jouant un peu moins le bio et plus la naturalité.
Par leur importance, les foires aux vins restent un observatoire privilégié d’autant que la moitié des amateurs de vins s’y approvisionne, et pas forcément à petit prix. Le rebond 2021 est certes dû aux effervescents, mais les foires aux vins n’ont pas dit leur dernier mot.
Bien cordialement,
Hugo Boffy