Index du forum Les rubriques Les vins étrangers Les vins d'Amérique du Sud

Les Brésiliens dans la course

Messagepar Jean-Pierre NIEUDAN » Ven 27 Fév 2009 09:01

J'étais quelque peu sceptique à l'invitation d'Ibravin -- L'Instituto Brasileiro do Vinho -- d'aller constater sur place à quel point vitis vinifera ne s'était pas égaré la liane entre deux ipê amarelos et autres morototos . Le Brésil avait-il domestiqué la bête? Qui plus est, ce pays pouvait-il aligner sa production sur celle des vins fins de la planète vin ? Surprise de taille .

Après seulement trois décennies, outillé d'un levier scientifique performant nommé Embrapa au sein du ministère de l'Agriculture, ce pays, 13 fois supérieur à la France en superficie mais ne couvrant que l'équivalent des deux tiers du vignoble bordelais seulement, met actuellement les bouchées doubles pour être dans la course. Et ça risque de fonctionner!

Mais pour y parvenir, la production brésilienne devra éviter les écueils. Et ils sont nombreux. Surtout, ne pas mettre la charrue devant les boeufs. Car, ne l'oublions pas, le Brésil est un pays émergent du Nouveau Monde (le cinquième plus gros producteur de l'hémisphère Sud) dont la feuille de route est relativement récente. Pour en avoir discuté avec quelques responsables locaux, certains points m'apparaissaient évidents.

D'abord, asseoir et consolider un marché intérieur actuellement voué essentiellement à une consommation de bière et de cachaça (eau-de-vie de canne très populaire pour assommer les singes et les faire tomber illico dans leur régime de bananes favori), alors que celle du vin, elle, oscille autour de deux litres per capita (essentiellement en provenance de l'Argentine et du Chili, les Brésiliens boudant leur production); observer ensuite les profils de consommation mondiaux en s'ajustant au plus près à cette fourchette de prix où va puiser le consommateur toujours plus exigeant; se doter enfin d'ambassadeurs de marque bien à eux sur le terrain -- de types Mondavi, Duboeuf, Concha y Toro et autres Rothschild --, dont les réputations respectives les précéderont quand viendra le temps de développer et de consolider le marché à l'étranger. J'allais oublier: éviter à tout prix cette détestable parkérisation du vin gonflé aux stéroïdes en mettant plutôt de l'avant des vins authentiques issus de cépages autochtones (arinarnoa, marselan, egiodola, etc.), traités à la sauce de l'agriculture agrobiologique, en évitant, bien sûr, de boiser le tout à 300 % fût neuf!

D'abord, asseoir et consolider un marché intérieur actuellement voué essentiellement à une consommation de bière et de cachaça (eau-de-vie de canne très populaire pour assommer les singes et les faire tomber illico dans leur régime de bananes favori), alors que celle du vin, elle, oscille autour de deux litres per capita (essentiellement en provenance de l'Argentine et du Chili, les Brésiliens boudant leur production); observer ensuite les profils de consommation mondiaux en s'ajustant au plus près à cette fourchette de prix où va puiser le consommateur toujours plus exigeant; se doter enfin d'ambassadeurs de marque bien à eux sur le terrain -- de types Mondavi, Duboeuf, Concha y Toro et autres Rothschild --, dont les réputations respectives les précéderont quand viendra le temps de développer et de consolider le marché à l'étranger. J'allais oublier: éviter à tout prix cette détestable parkérisation du vin gonflé aux stéroïdes en mettant plutôt de l'avant des vins authentiques issus de cépages autochtones (arinarnoa, marselan, egiodola, etc.), traités à la sauce de l'agriculture agrobiologique, en évitant, bien sûr, de boiser le tout à 300 % fût neuf!

Températures? Entre 9,4 et 31,7 °C pour les maximums, avec des précipitations s'échelonnant entre 599 mm par année au nord et 1736 mm au sud, du côté de Serra Gaucha justement, là où se concentre l'élite de la production actuelle. Parce que vous êtes drôlement futé, vous avez évidemment compris que les altitudes et les expositions de plantations sont ici en tout point primordiales pour obtenir la crème de la crème. Le Brésil, c'est surtout le pays du merlot, qui se distingue ici par sa régularité qualitative, mais aussi d'une batterie de cépages européens bien connus des consommateurs.

L'immigration italienne

Ce sont principalement les Italiens qui débarquent, fin XIXe siècle, du côté de Rio Grande do Sul, avec comme bagage boutures et techniques utilisant la pergola classique. Toujours en opération, ce mode de conduite de la vigne laisse peu à peu la place au mode Guyot simple sur fil de fer avec toute la batterie d'opérations (épamprage, effeuillage, vendange en vert, etc.) classiques aux autres vignobles du monde.

Dès 1931, 16 de ces familles italiennes se regroupent et fondent ce qui est devenu aujourd'hui Aurora, la plus grosse coopérative du genre au pays avec plus de 1300 familles coopérantes qui s'accaparaient, en 2008, 36 % du marché domestique. Beaucoup de vin, à bon prix, d'une qualité standard, dont une profusion de mousseux (principalement issus de la méthode charmat) qui semblent, partout au pays, susciter cet esprit de la fête typique à la mentalité brésilienne. Même les bulles naissent ici sous les auspices de la samba.

Plusieurs maisons ont été visitées, et des plus ambitieuses, comme cette Cave de Amadeu qui aspire, ne serait-ce que par les prix exigés, à se positionner comme le Dom Pérignon national. La gamme restreinte, à base de chardonnay et de pinot noir, élevée entre deux et dix ans sur lies fines, sans dosage pour 50 % de la production, m'incite à penser que l'ambition de départ semble réaliste. À surveiller, donc.

Grosses structures parfaitement équipées, à la fine pointe de la technologie, comme Salton, Casa Valduga, Miolo (Michel Rolland y est consultant), ou encore Vinibrasil, dont les vignobles perchés du côté de Vale do São Francisco produisent jusqu'à deux vendanges annuelles (!), et d'autres, plus modestes, où l'ambiance familiale est encore bien sentie, comme ces Cordelier, Dal Pizzol, Dôm Candido, Vallontano et Pizzato.

Mais que diriez-vous d'une maison qui découpe ses parcelles comme des climats bourguignons, qui dorlote la vendange à la vigne comme au chai comme un grand cru bordelais et qui -- ô scandale! -- n'utilise aucune barrique sur la propriété? Vous êtes à la Vinicola Boutique Lidio Carraro, dont l'ensemble de la production mérite un sacré coup de chapeau. Avec une telle locomotive, le Brésil a sans doute trouvé sa bête de concours sur le plan international. Ne reste plus maintenant qu'à travailler intelligemment la base pour mieux séduire le consommateur. Sans lui mettre la liane autour du cou! On s'en reparle aujourd'hui chez Christiane Charette, à l'antenne de Radio-Canada.

- Potentiel de vieillissement du vin: 1, moins de cinq ans; 2, entre six et dix ans; 3, dix ans et plus. ©: le vin gagne à séjourner en carafe.

http://www.ledevoir.com
La vérité est dans la bouteille ..( Lao Tseu )
Avatar de l’utilisateur
Jean-Pierre NIEUDAN
 
Messages: 9570
Inscrit le: Mer 24 Oct 2007 10:23
Localisation: Hautes Pyrénées

Re: Les Brésiliens dans la course

Messagepar vinosophe » Ven 27 Fév 2009 14:05

je ne suis pas trop surpris par cet article ...et la belle évolution du vignoble Brésilien !!!

j'avais eu l'occasion il y a une bonne quinzaine d'années de déguster quelques vins Brésiliens sans grand intérêt: des blancs ternes , des merlot légers et plutôt rustiques... mais depuis 2 ou 3 ans, les rares vins Brésiliens que j'ai pu redéguster m'ont surpris agréablement...avec en particulier un étonnant CONDE DE FOUCAUD brut NM à base de chardonnay qui m'a semblé très" proche " d' un Champagne de bon niveau... ;)

A suivre donc !!! :|
Dernière édition par vinosophe le Dim 15 Sep 2013 10:31, édité 1 fois au total.
CHRISTOPHE
vinosophe
 
Messages: 5637
Inscrit le: Ven 19 Oct 2007 23:38
Localisation: BOURG en Gironde

Re: Les Brésiliens dans la course

Messagepar vinosophe » Jeu 19 Jan 2012 21:25

Ah...au fait!... le BRESIL est toujours en Amérique du SUD !!!?

j'en profite pour signaler un autre CONDE DE FOUCAULD brut à base de ...riesling et sémillon (!!!) dégusté il y a un mois, et de niveau très correct, avec une belle finale citronnée pleine de fraicheur, malgré une légère amertume...noté 15+
CHRISTOPHE
vinosophe
 
Messages: 5637
Inscrit le: Ven 19 Oct 2007 23:38
Localisation: BOURG en Gironde

Re: Les Brésiliens dans la course

Messagepar Vincent R. » Ven 20 Jan 2012 00:07

vinosophe a écrit:Ah...au fait!... le BRESIL est toujours en Amérique du SUD !!!?
...


Et moi qui les croyais tous au bois de Boulogne... :lol:
J'hésitais sur la rubrique où les mettre, je me disais qu'il devait aussi y avoir des brésilien(ne) ailleurs en France :jesors:
BAREME DE NOTATION 19+ À 20:MYTHIQUE 18+ À 19:EXCEPTIONNEL 17+ À 18:TRÈS GRAND VIN 16+ À 17:GRAND VIN 15+ À 16:TRÈS BON VIN 13+ À 15:BON VIN 11+À 13:MOYEN 10 À 11:FAIBLE <10:DÉFECTUEUX
en dessous de 16, je n'achète pas! il y a si bon ailleurs!
Vincent R.
 
Messages: 8873
Inscrit le: Ven 26 Oct 2007 08:32
Localisation: Entre Béarn et Bigorre

CASA VALDUGA - Brésil:

Messagepar vinosophe » Ven 13 Avr 2012 08:27

"à la fine pointe de la technologie comme Salton (voir article d' Emilie!), Casa Valduga, Miolo..."

Et bien, c'est vrai: j'ai fait gouter hier soir à l'aveugle la Gran Reserva 2006 de CASA VALDUGA dans le cadre d'une découverte de grands cabernets sauvignons du monde... et c'est très bon!...nez complexe de cassis et poivron rouge, belle fraicheur et bon équilibre en bouche: un vin harmonieux, techniquement bien fait, long et gourmand...: noté 16 !
CHRISTOPHE
vinosophe
 
Messages: 5637
Inscrit le: Ven 19 Oct 2007 23:38
Localisation: BOURG en Gironde


Retour vers Les vins d'Amérique du Sud

Qui est en ligne ?

Utilisateur(s) parcourant ce forum : Aucun utilisateur inscrit and 2 invités