Visite au domaine Buisson-Charles
Désormais mes sorties en Bourgogne se limitent sur le plan gustatif à une halte au domaine Buisson-Charles ! En fait cette halte est l'objet de mon périple. Pourtant notre venue tombe au plus mal, je n'ai pas pu prévenir assez tôt et la principale préoccupation du domaine est le strict effeuillage des vignes afin de sauver le millésime 2016 ! Patrick parvient pourtant à se libérer et nous reçoit avec son amabilité habituelle.
Je rappelle que je suis un anticonformiste de la prise de note, je ne sors que ce que mon cerveau a emmagasiné mais je pense que mon compte-rendu sera fidèle ! Chose importante à signaler : le millésime 2014 au domaine Buisson-Charles m'avait enthousiasmé, eh bien avec le 2015 nous passons un cran au-dessus, comme si cela était possible !!! Alors ne vous étonnez pas si vous voyez les coups de cœur se multipliaient : ce sont les témoins de mes sensations.
La dégustation commence par les rouges en barrique du millésime 2015 :
- Bourgogne générique "Les Hautes Coutures" : se présente sur des arômes de fruits rouges ; la matière est belle, avenante ; ce n'est pas un monstre de concentration, mais tout est là pour faire une belle cuvée.
- Pommard "En Chiveau" : comme tous les ans, la cuvée de Pommard est plus fermée que la précédente, mais aucun souci : la matière est bien présente et ce Pommard saura, j'en suis persuadé, nous donner le meilleur de lui-même quand il aura atteint l'âge de raison.
-Volnay 1er Cru "Les Santenots": cette cuvée se livre beaucoup plus aisément que la précédente ; tout est là : finesse, profondeur, distinction et Coup de cœur !
Viennent ensuite les blancs en barrique du millésime 2015 :
- Aligoté : je dois avouer que cet aligoté n'a rien à voir avec ce que nous pouvons déguster habituellement sur ce cépage ; j'ai déjà fait à maintes reprises l'apologie de l'aligoté de ce domaine, mais là j'avoue que j'ai été bluffé : à l'aveugle je n'aurais jamais reconnu un aligoté, peut-être une acidité un peu plus marquée que le Chardonnay et encore ... tout est discutable, sauf le Coup de cœur !
- Bourgogne générique "Les Hautes Coutures" : j'ai tellement été impressionné par la cuvée précédente que je suis peut-être passé à côté de ce cru de Chardonnay qui tient pourtant fort bien la route et qui ressemble à un Meursault-village !
- Meursault "Vieilles Vignes" : vin aux arômes de fruits blancs (pomme, pêche, poire ...) et d'une grande profondeur ; pour moi nous arrivons au stade des grands vins du domaine et sans aucune hésitation : Coup de cœur !
Attention, pour les deux crus suivants, j'ai peut-être commis involontairement une inversion...
- Chassagne-Montrachet 1er Cru "Les Caillerets" : vin à la fois aimable et distingué : toute la Bourgogne qui se livre aux néophytes et aux passionnés.
- Chassagne-Montrachet 1er Cru "La Romanée" : nous retrouvons bien sûr les caractéristiques précédentes, mais avec plus de profondeur et un caractère plus masculin, ce qui nous entraîne inéluctablement vers un nouveau Coup de cœur !
- Puligny-Montrachet 1er Cru "Le Cailleret" : quand on connaît les voisins sudistes de ce cru, on retire le béret et on s'incline en signe de respect ! D'ailleurs si ce cru n'est classé qu'en premier cru (excusez du peu) c'est parce qu'à l'époque de la classification, il était complanté avec du pinot noir, sinon il aurait rejoint le rang des Bâtards et autre Chevalier ... que dire de plus sinon que ce vin révèle une précision exemplaire, une dignité seigneuriale et un corps athlétique : Coup de cœur !
- Meursault 1er Cru "Les Cras" : nous changeons de registre et partons sur des connotations plus minérales et fruitées, mais encore un très grand équilibre : la plus belle cuvée selon mon accompagnateur _ Coup de cœur !
- Meursault 1er Cru "Les Charmes" : peut-être un peu plus de fruit et de fraîcheur mais aussi d'épice que sur la cuvée précédente : nous ne quittons pas les géants viniques ! Coup de cœur !
- Le regard de Patrick s'illumine lorsqu'il nous présente cette nouvelle cuvée : Meursault 1er Cru "Goutte d'or" ! En littérature, nous évoquons souvent la règle des quatre W (what / who / when / where), ici je parlerais plus aisément de la règle des quatre P : Pureté, Précision, Profondeur, Persistance ! Le vin répond avec brio aux quatre paramètres ! Je ne sais pas comment évoluera cette Goutte d'or, mais elle est partie pour rejoindre les Olympiens et je vous rappelle qu'en mythologie, lors de la prise du pouvoir du cosmos, ce sont les Olympiens qui sont sortis vainqueurs sur les Géants et les Titans ! Ce n'est qu'une question de patience : bienheureux ceux qui pourront fêter son demi-jubilé ! Indispensable dans toute œnothèque (au sens étymologique, c'est-à -dire l'endroit où est entreposé le vin) digne de ce nom !
- Meursault 1er Cru "Les Bouchères" : toujours cette parfaite pureté, mais ici c'est la finesse qui règne : Les Bouchères sont le penchant féminin de la Goutte d'or : époustouflant ! Coup de cœur !
Patrick nous propose quelques 2014 en bouteille, mais après cette apothéose, l'opération s'avère délicate.
- Chablis 1er Cru "Les Lys" : il faut préciser dans un premier temps qu'en règle générale, je suis plus attiré par les vins murisaltiens que par les vins chablisiens. Là j'ai l'impression d'être un coureur cycliste qui après une longue descente abrupte tente de retrouver son coup de pédale et se retrouve en perte d'équilibre...
- Chablis Grand Cru "Vaudésir" : arômes plus précis sur les agrumes, cuvée plus équilibrée et plus persistante que la précédente !
- Meursault "Vieilles Vignes" : je retrouve ces sensations de fruits blancs et une matière plus généreuse ! Décidément, Meursault quand tu nous tiens !
Patrick nous avoue qu'en ce moment peu de gens passent au domaine et qu'en fait les trois cuvées dégustées sont ouvertes depuis près de trois semaines : par conséquent joker pour le Chablis 1er cru "Les Lys" ! Enfin la dernière bouteille est un Meursault "Vieilles Vignes" dont l'ouverture remonte à deux ou trois jours : nous retrouvons les mêmes sensations que sur la bouteille précédente mais avec de la précision en plus : ouh la ! très grand aussi le 2014 sur les Vieilles Vignes : Coup de cœur !
Je relis ce compte-rendu et me dis qu'à force de ressentir des coups de cœur, il n'y a plus véritablement de coups de cœur ! Je dois reconnaître que c'est le millésime 2015 du domaine qui est à lui seul un coup de cœur généralisé : aucune cuvée ne doit être mise de côté et c'est bien ce qui me gène pour ma réservation : il va bien falloir faire un choix !
Enfin pas besoin de notes car à part les deux Chassagnes, tout était incrusté dans mon cerveau, preuve que ce fut une dégustation de très grande classe !