par LES SENTIERS3 » Mar 27 Oct 2020 15:57
Visite au domaine Buisson-Charles ou comment une simple balade bourguignonne devient une Odyssée vinique ...
Ne me sentant pas trop mal ces derniers temps, j’ai pris la décision d’aller chercher mes réservations chez deux propriétaires-récoltants, dont le domaine Buisson-Charles. Lors de cette réunion, j’ai pu rencontrer physiquement une vieille connaissance déceienne que j’ai continué à suivre sur les réseaux sociaux : Pierre Radmacher ! Trois profs réunis, évidemment le sujet éducatif est évoqué surtout en ces temps si particuliers ; d’ailleurs j’en profite pour évoquer les suspicions d’un nouveau confinement sauf dans le milieu scolaire (évidemment il faut bien des kamikazes pour garder les gamins dont la moitié est toujours malade : et ça tousse ... et ça sniffe ... et bien d’autres choses encore que la bienséance m’interdit de citer). Revenons au but de ce post, c’est-à -dire à notre visite au domaine murisaltien. Patrick nous tend les verres et nous entraîne vers la cave pour une dégustation du millésime 2019 ; les vins présentés ont été tirés la veille et nous commençons par les rouges :
Bourgogne « Hautes Coutures » : aux arômes de cerise et de fruits noirs, le vin est plus charpenté qu’il y a une dizaine d’années ... à l’aveugle, je partirais sur une appellation plus cotée... ça commence fort : coup de cœur !
Pommard « En Mareau » : je crois qu’il lui a été difficile de passer après les Hautes-Coutures » ; cette cuvée est je pense renfermée sur elle-même ... c’est vrai qu’ici le Pommard est souvent difficile dans sa prime jeunesse : laissons le temps au temps !
Volnay 1er Cru « Les Frémiets » : c’est une nouveauté du domaine ... explosion olfactive sur les fruits rouges, bouche tendre, suave et lisse : du velours ! Coup de cœur !
Volnay 1er Cru « Les Santenots » : c’est le côté masculin des Frémiets, à savoir une charpente plus impressionnante ; un vin charnu, musclé mais aussi bien équilibré, coup de cœur !
Nous rinçons les verres puis nous passons aux blancs.
Bourgogne aligoté « Sous le chemin » : je vous ai souvent parlé du Bourgogne aligoté de ce domaine ; le 2019 ne déroge pas à la règle : parfumé, bouqueté, frais, salivant ; tout pour se faire plaisir avec un cépage trop souvent décrié.
Bourgogne « Hautes Coutures » : le nez est propre aux cuvées de blanc du domaine : fruits blancs, fleurs blanches, léger effet crayeux ... en bouche, légère viscosité qui s’étend sur une notion à la fois liquoreuse et fraîche ; ce n’est pas l’appellation Meursault, mais ça lui ressemble comme Dupont et Dupond : de la belle ouvrage ... et coup de cœur !
Meursault « Vieilles Vignes » : tout comme le Pommard, il lui est difficile de passer après le Bourgogne générique ; comme les « Hautes Coutures » sont plus incisives, le vin me semble moins frétillant, mais tout est là pour faire un bon Meursault !
Meursault « Vigne de 1945 » : les Pellans, à proximité Est des Charmes, nous réservent une cuvée fruitée dont la principale représentation est la poire ; c’est un vin qui se boit tout seul... c’est élégant, gracieux, presque apaisant : bel équilibre !
Meursault « Les Tessons » : je passe le verre sous mon nez, je regarde Patrick et m’écrie : « ça va faire un grand truc, ça ! » ... mes propos triviaux sont le reflet de mes sensations ; la bouche confirme mon extase ... un grand Meursault, fin, équilibré, bouqueté, soutenu : coup de cœur !
Meursault 1er Cru « Les Cras » : toujours sur les fruits blancs, Pierre retrouve des notes crayeuses, voire poudreuses ... je les ressens moins bien que lui, mais fiez-vous à lui, ses perceptions sont plus pointues que les miennes !
Meursault 1er Cru « Les Charmes » : cette cuvée me rappelle la vigne de 1945, ce qui est bien normal, puisque les deux crus sont voisins ... donc toujours des arômes de poire subtiles et plaisants... une belle trame gustative !
Meursault 1er Cru « Goutte d’or » : vin totalement différent du précédent ; plus crypté, belle corpulence, sur un effet légèrement grillé (effets d’élevage ?), Pierre évoque l’amande grillée ou la noisette ... Patrick propose une sensation de raisins rôtis : je ne sais ...
Je teste au nez, le vin suivant et annonce « Bouches chères » : bonne pioche... vous allez me dire que je n’ai pas pris beaucoup de risques : mais cela aurait pu être une cuvée de négoce... une telle finesse, un tel apparat ne se rencontrent qu’aux Bouchères ; il y a peu de temps, Patrick annonçait que les « Bouches Chères » étaient du niveau Grand Cru : je ne peux qu’adhérer à ses propos ; en effet, parmi les grands Crus que j’ai pu déguster en Côte de Beaune (Corton-Charlemagne, Bâtard-Montrachet, Bienvenue-Bâtard-Montrachet, Criots-Bâtard-Montrachet), je n’ai jamais rencontré une finesse aussi subtile que Bouchères ... alors c’est vrai que je n’ai jamais porté à mes lèvres l’illustre Chevalier-Montrachet ; d’après ce qu’on a pu m’en dire, il présente lui aussi une finesse peu commune ... si un jour j’ai l’occasion, je ne manquerai pas de m’exprimer à son sujet et de faire le rapprochement avec les Bouches Chères si cela me paraîtra pertinent. Pour le moment « Les Bouches Chères» 2019 sont d’une beauté rarement égalée : le nez est un rêve, la bouche, une divine délectation ... bien évidemment coup de cœur !
Pour terminer cette somptueuse dégustation, Patessa (comme nous l’appelions autrefois) nous propose trois 2018 :
Je n’entends pas quand il annonce la première appellation : le vin me semble plus plat, j’ai en tête le Meursault « Vieille Vigne », mais il s’agit de la « Vigne de 1945 » !
Pour la deuxième cuvée 2018, je lui demande de ne pas m’annoncer l’appellation : le vin me paraît crypté, complexe, à l’image du Goutte d’or précédent ... c’est ce que j’annonce .... et pan, ce sont les Charmes ! Je n’ai pas retrouvé les arômes de poire du 2019 et je me suis égaré !
La troisième cuvée 2018 : Meursault « Bouches Chères », là je pense que j’aurais reconnu : finesse, distinction, élégance, féminité dans ce qu’elle a de plus somptueux, éclat ... coup de Cœur !
Et comme pour les trois mousquetaires, il n’y a pas de trois sans quatre, Patrick nous propose, en guise de point d’orgue, le Meursault « Les Tessons » qui n’est pourtant qu’une appellation village, mais qui ne baisse pas les yeux face au monument précédent : il a même l’audace de jouer des biceps comme un culturiste, prend des poses osées et ... nous fait perdre les sens ... : incontournable !
Suite à cette Odysée gustative, mes constatations sont diverses :
- J’ai raté l’incontournable (Les Tessons 2018), mais j’ai une excuse, je ne les avais pas goûtés avant ma réservation.
- J’ai été fort impressionné par l’organisation de Paul Radmacher : ses prises de notes, ses photos ... c’est vrai que les illustrations dans mes CRs, ce n’est pas mon point fort !
- 2018 comme 2019 sont deux géants chez Buisson-Charles !
- Toujours l’impression d’avoir vécu des moments extraordinaires quand je quitte le domaine.